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On croit bien connaître le divin marquis. Depuis deux siècles, la critique littéraire s’est bâtie sur une conviction profonde, persistante et consensuelle: l’immoralisme de Sade qui, dit-on, fait l’apologie du crime, du vice, du mal. On s’occupe de nous dire comment, on ne demande pas pourquoi. Jean-Baptiste Jeangène Vilmer établit qu’il s’agit là de l’un des plus formidables contresens de l’histoire des idées. Dans quelle mesure Sade pense-t-il ce qu’il écrit? Selon une méthode rigoureuse, fondée essentiellement sur la contextualisation de l’œuvre, sont dégagées de frappantes coïncidences entre le monde sadien et la réforme pénale française du XVIIIe siècle. A travers l’environnement judiciaire d’un écrivain emprisonné se dévoile, contre toute attente, un Sade moraliste que conforte l’argumentation philosophique, juridique comme historique. En travaillant sur la totalité des textes du marquis, de la fiction à la correspondance et des ouvrages les plus fameux aux lignes habituellement négligées, Jean-Baptiste Jeangène Vilmer montre pourquoi le moralisme de Sade unifie son œuvre, tandis qu’on ne pouvait jusqu’alors rendre compte de son prétendu immoralisme qu’en la divisant.