Ce livre examine comment la prose narrative française de l’extrême contemporain remet en cause l’anthropocentrisme et le partage dualiste qui oppose l’humanité au monde naturel. L’étude s’articule autour du concept de l’interconnectivité, un des piliers centraux de la pensée écologique, qui permet de penser le système-Terre comme un tissage dense de liens dont l’humanité fait pleinement partie. S’inspirant de différentes interprétations (souvent métaphoriques) de cette idée, comme le « maillage », le « tissage » ou la « toile » du vivant, le rhizome ou la mycorhize, l’analyse vise à déterminer comment les auteurs intègrent cette nouvelle perspective afin de dépasser, par l’écriture, les dualismes traditionnels. En effet, d’autres oppositions binaires se sont greffées sur ce binarisme de base humanité – nature.
Outre la mise en question de la pensée binaire, l’étude entend illustrer comment les textes contemporains renouvellent la forme du roman réaliste. Selon le diagnostic d’Amitav Ghosh, la forme romanesque se focalisait par le passé trop exclusivement sur le développement psychologique d’un ou de plusieurs protagonistes humains : le roman réaliste traditionnel serait pour cette raison inadéquat pour aborder la problématique de la crise environnementale, qui s’inscrit dans un temps long.
L’étude commence par définir le concept d’interconnectivité écologique dans une perspective qui prend en considération l’imaginaire – politique, social, scientifique, … – de l’Anthropocène pour se consacrer ensuite à des analyses textuelles qui font résonner les dualismes « secondaires ». S’invitent ainsi au fil des chapitres la tension entre la langue littéraire et la matérialité du monde et l’opposition global – local. L’étude se focalise ensuite sur le corps, à travers une interrogation qui porte sur la problématique de l’alimentation et celle de la pollution, qui affectent aujourd’hui de manière importante le corps humain. La recherche se clôture par l’examen de la tension entre raison et sensorialité.