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En 1783, l’évêque de Limoges Louis-Charles Du Plessis d’Argentré publie un bréviaire à l’usage de son diocèse, avec un propre des saints profondément remanié, revisitant notamment les leçons du deuxième nocturne qui retracent la vie des saints. La singularité de l’« Ecole limousine » repose sur ces abbés érudits, Oroux, Nadaud et Legros, des prêtres du diocèse rompus aux nouvelles méthodes de la critique historique, qui œuvrent aux côtés de Louis-Étienne Rondet et de l’abb© Du Mabaret, cherchant dans la bibliothèque du séminaire les sources permettant d’appuyer le culte des saints sur une réalité historique. Pourtant, l’élaboration des leçons ne se fait pas sans tension : en l’absence de sources, faut-il respeter la tradition, en épurant un peu, ou rejeter tout ce qui ne serait pas assuré ? La publication du bréviaire de 1783 est le résultat de cette tension entre tradition ecclésiastique et histoire, et c’est là son originalité. Le bréviaire est un document essentiel qui montre comment un diocèse comprend et célèbre son histoire religieuse et, par là, permet d’aborder la question de la « tradition ecclésiale », comme l’appelleront les théologiens et les historiens de la liturgie des XIXe et XXe siècles. On suit au fil des pages le processus d’élaboration de ce bréviaire où les rédacteurs se sont employés à ne blesser ni la méthode historique ni la mémoire croyante, ouvrant ainsi une voie originale entre bréviaire « gallican » et bréviaire « romain ».