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En complémentarité avec le volume collectif sur La suffixation des anthroponymes grecs antiques (HEMGR 55, 2017), le dictionnaire dont voici le premier des trois volumes est conçu comme la mise à jour de l’ouvrage fondateur de F. Bechtel, Die historischen Personennamen des Griechischen bis zur Kaiserzeit (HPN 1917) à partir des huit volumes actuellement parus du Lexicon of Greek Personal Names d’Oxford (ca 400 000 individus répertoriés, porteurs d’environ 40 000 noms différents, en principe en alphabet grec). Le corpus des noms de personnes étudiés (environ 36 000 au total) est un peu inférieur à celui du LGPN : certains d’entre eux, en effet, seulement hellénisés par le suffixe, sont en fait d’origine linguistique non grecque (thrace, celtique, iranienne, anatolienne, égyptienne, sémitique, italique ou étrusque). L’accroissement du corpus, de 140 % par rapport aux HPN, s’explique par l’extension géographique et chronologique du domaine d’étude, qui comprend l’essentiel du bassin méditerranéen (Égypte et Syrie non comprises), de la période archaïque au début de l’époque byzantine.
Notre objectif est donc d’offrir l’analyse la plus complète possible du sémantisme de chaque nom grec. D’une manière générale, trois raisons principales fondent le choix de l’idionyme : 1) le sens étymologique ; 2) les représentations idéologiques et culturelles associées – véhiculées notamment par les noms propres des autres champs de l’onomastique exploités –, qui sont elles-mêmes fonction des différents réseaux d’appartenance de l’individu, du plus large, le monde hellénique puis gréco-romain, au plus étroit, le cercle familial ; 3) la transmission patrimoniale, qui relève de ce seul dernier cercle.
Il s’agit, dans ce cadre, d’explorer, à partir du lexique, avec lequel l’anthroponymie est en étroite relation d’imbrication – et en s’appuyant sur les collocations phraséologiques pour les noms di- ou tri-bases –, la part plus nettement dénotative de la signification du nom ; et en corrélation avec les données plus proprement individuelles disponibles au-delà du strict champ linguistique, qu’elles soient prosopographiques, relèvent d’autres champs de l’onomastique ou ressortissent plus largement à divers contextes géo-historiques et socio-culturels, la part plus proprement connotative de son sémantisme.
Le fait que les cinq premières lettres de l’alphabet réunissent à elles seules le tiers du corpus des noms est à l’image de la distribution des mots du grec ancien dans le Greek-English Lexicon de Liddell, Scott et Jones.
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A l’ouvrage fondamental de F. Bechtel, Die historischen Personennamen des griechischen bis zur Kaiserzeit (1917), consacré aux radicaux des noms de personnes grecs antiques, les vingt-trois articles ici réunis procurent le complément nécessaire de l’étude des suffixes, en offrant son volet onomastique au livre de P. Chantraine, La formation des noms en grec ancien (1933). Dialectologues et linguistes, surtout spécialistes du grec, mais aussi des langues italiques, étrusque et thrace, livrent leurs réflexions tant sur la préhistoire et l’histoire contrastives de l’affixation que sur les modalités et les spécificités de la suffixation. La difficulté d’analyse de certains types suffixaux, imputable à la perméabilité de plusieurs types flexionnels, que renforce encore l’absence de caractérisation sémantique nette de la plupart des suffixes, n’empêche pas le système d’être relativement stable entre le IIe millénaire avant et le Ve s. après J.-C. Pour pallier le caractère, en outre, souvent peu marqué morphologiquement des suffixes, la tendance est à leur accrétion par concaténation : c’est ce qui distingue le plus visiblement l’anthroponymie du lexique. Le renouvellement suffixal contribue ainsi à l’individualisation des noms de personnes. De riches indices, dont une liste exemplifiée des affixes et chaînes suffixales, fourniront aux épigraphistes, aux historiens et aux linguistes un indispensable complément à ceux des Onomastica graeca selecta d’Olivier Masson, éd. C. Dobias et L. Dubois (1990 et 2000).
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Table des matières
Catherine Dobias-Lalou, "Avant-propos"
Sophie Minon, "Introduction. Pour une géographie historique et sociale de la koinéisation du grec ancien"
Stephen Colvin, "Perceptions synchroniques des dialectes et de la koiné"
Sophie Minon, "Les mutations des alphabets péloponnésiens au contact de l’alphabet attique ionisé (ca 450-350 av. J.-C.)"
Emilio Crespo, "Diffusion de l’attique et développement de koinai dans le Péloponnèse (1re moitié du IVe siècle av. J.-C.)"
Enrique Nieto Izquierdo, "La diffusion de la koiné en Argolide au IVe siècle : les premières étapes"
Laurent Dubois, "Dialecte et langues communes en Arcadie à l’époque hellénistique"
Mathilde Douthe, "La koina du Nord-Ouest : nature et développement"
Nicole Lanérès, "Le messénien : un dialecte introuvable ?"
Alcorac Alonso Déniz, "L’esprit du temps : koiné, dialecte et hyper-dialecte dans les inscriptions agonistiques du sanctuaire d’Artémis Orthia à Sparte"
Résumés
Abstracts
Bibliographie sélective
Index des sources
Index témoignant de la diffusion de l’attique et de la koinéisation
Index des notions
Cet ouvrage s’inscrit dans la continuité des cinq volumes intitulés La koiné grecque antique publiés par C. Brixhe et R. Hodot, où ont été exposées les voies d’approche pour étudier le développement de la langue commune ainsi que les questions théoriques que posent les phénomènes de concurrence, de contacts linguistiques et de variations sociolinguistiques. Le Péloponnèse et la Grèce centrale, où se forgèrent, dans la zone d’influence du dialecte attique, plusieurs variétés de koinai doriennes, offrent à ce champ d’étude un laboratoire exceptionnel.Sont traitées ici les réformes des alphabets et les voies particulières qu’elles ont suivies selon les cités, puis la diffusion de l’attique dans le Péloponnèse au IVe siècle av. J.-C. Des études par aire dialectale mettent en lumière aux siècles suivants la propagation de la koiné et le développement corollaire de formes de koinai en Argolide et en Arcadie, ainsi qu’à Delphes, celui de la koina du Nord-Ouest. Les analyses menées sur des échantillons d'époque impériale des corpus épigraphiques laconien et messénien font voir comment les résurgences de ces dialectes ont été utilisées à des fins identitaires régionales. À l’inverse, la koiné a souvent été perçue par les grammairiens et les historiens anciens à la fois comme dialecte et comme hyperdialecte, vecteur d’une identité panhellénique.
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Dès l’Antiquité, Strabon signalait que l’usage fréquent que les Grecs d’Elide faisaient du rhô prêtait à rire, et le lexicographe Hésychius qualifiait ce peuple du Péloponnèse de barbarophônoi, décrivant leur parler comme rude et peu clair. Aussi les Modernes s’intéressèrent au dialecte éléen dès la publication des premières inscriptions découvertes à Olympie, au début du XIXe siècle. Depuis, le nombre de textes éléens s’est notablement accru. Leur réunion en corpus constitue aujourd’hui une première contribution à la réédition des Inschriften von Olympia publiées en 1896. Le premier volume présente l’édition traduite et commentée des inscriptions éléennes dialectales. Toutes les catégories de documents inscrits ont été prises en considération, qu’ils soient privés ou publics, comme les nombreuses lois sacrées ou les monnaies. Ainsi est-ce l’ensemble des vestiges du dialecte qui est réuni et classé chronologiquement, de la seconde moitié du vie siècle jusqu’aux derniers documents, datant de ca 200 avant notre ère. L’étude des textes du vie et du Ve siècle apporte un éclairage nouveau sur la vie politique et le fonctionnement institutionnel de la cité d’Elis ainsi que sur la domination qu’elle exerça sur les petites cités sises aux alentours du sanctuaire d’Olympie, en Pisatide et en Triphylie. Le second volume fournit une grammaire complète du dialecte. A l’étude graphique, phonétique et phonologique des textes succède celle de la morphologie, de la syntaxe et du lexique complété par les gloses et une étude onomastique. L’analyse des textes qui illustrent le déclin du dialecte conclut cette grammaire. L’ouvrage associe ainsi les approches institutionnelle, philologique et linguistique pour donner sens à des textes de prime abord difficiles. Il apporte une contribution à l’histoire des Eléens et d’Olympie de l’archaïsme à l’époque hellénistique.