Parce que la critique d’art est trop souvent méconnue, il s’agit de la réévaluer, non simplement à l’aune des autres genres littéraires qui lui opposent l’amplitude de leurs traditions, mais au regard d’une époque au sein de laquelle sa présence s’est avérée superbe. Au tournant des XIXe et XXe siècles la critique d’art prolifère en Europe et aborde non seulement les origines de la création contemporaine, picturale en particulier, mais pose aussi les jalons d’une véritable anthropologie culturelle et religieuse.
La critique d’art révèle à un moment crucial de l’histoire des mentalités religieuses en Occident comment la peinture gère les nouveaux rapports de l’homme au monde et au sacré. A une époque de plus en plus sécularisée, où les idéologies se substituent aux croyances, les critiques d’art saisissent le sacré au cours de ses variations et tissent dans leur écriture les réseaux multiples d’une culture en mal de critères intellectuels et spirituels. Dès lors ils tiennent la chronique de la peinture autant que du sacré contemporain.
Au fur et à mesure que l’art sacré laisse la place au sacre de l’art, la critique devient le miroir réflexif de la culture occidentale européenne. En faisant valoir la singularité de sa démarche et de sa rhétorique, son infinie pertinence et vivacité, elle s’est inventée comme un genre particulier.