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Travail d’érudition considéré comme le chef-d’œuvre de Guillaume Budé, le De Asse et partibus eius libri V («Les Cinq Livres de l’As et ses fractions») cache sous ce titre, abrégé en «De Asse», une étude vaste et novatrice sur les données chiffrées dans l’économie de l’Antiquité, surtout au sein du monde romain, républicain, impérial et tardif, mais incluant aussi des sections consacrées à la Grèce classique et hellénistique ou à l’Orient (Egypte, Perse, Palestine biblique). Ecrit en latin, le texte du De Asse occupe l’équivalent d’environ 800 pages en format in-8°. En dépit de la difficulté du sujet, cet ouvrage savant a bénéficié dès le vivant de Budé d’un véritable succès européen dans la République des Lettres, pour plusieurs raisons: l’intérêt très fort à la Renaissance pour les «realia» de l’Antiquité, la présence dans le De Asse de digressions politiques et culturelles vigoureusement réformatrices, un récit qui accompagne de manière vivante le lecteur dans les méandres des recherches, sans en cacher la complexité et les faux-fuyants.
Le statut composite du De Asse a entraîné la nécessité d’un long travail d’identification des citations, mais aussi des recherches sur les sources concrètement utilisées par Budé, qui ne sont pas encore toutes connues mais que Luigi-Alberto Sanchi révèle avec maestria érudite. Le premier tome de cette édition comporte ainsi le texte, les variantes, la traduction française des trois premiers livres de l’ouvrage et de riches index.
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Les Commentaires de la langue grecque constituent la première tentative de dictionnaire grec fondé sur le dépouillement lexicographique d’un vaste corpus d’auteurs grecs, une centaine environ. Or, cet ouvrage n’est pas organisé selon l’ordre alphabétique qui convient à un dictionnaire, ni comme un thesaurus, par mots-racines, mais il se présente sous les dehors d’une longue dissertation sur la langue grecque, avec de fréquents renvois à ses équivalents latins. De plus, nombre de digressions enrichissent le discours principal, conférant au livre l’allure d’une encyclopédie littéraire, philosophique, scientifique et juridique. Enfin, les textes liminaires sont remarquables : la préface au roi François Ier est considérée comme l’acte de naissance du Collège des Lecteurs royaux, futur Collège de France, tandis que la postface « aux jeunes gens épris de lettres grecques » est un manifeste de didactique humaniste. Mis à part la préface et quelques extraits, les Commentaires n’ont jamais fait l’objet d’une étude systématique.
L’étude pionnière sur les Commentaires dans leurs deux éditions (1529 et, posthume, 1548 puis 1557) s’est fondée sur trois éléments : l’analyse des 1560 colonnes de texte dans l’édition de 1557 ; le dépouillement informatique des quelques 20 000 citations grecques et latines que Budé y a insérées ; la collation de l’exemplaire de l’édition de 1529 ayant appartenu à Budé (BnF, Rés. X. 67), qui l’a richement annoté en l’augmentant d’environ un tiers, en vue de la deuxième édition.
Ces trois assises ont permis, d’une part, de rendre compte de la véritable construction des Commentaires, d’autre part d’éclairer les étapes de la préparation dun ouvrage aussi novateur, afin de mieux comprendre les méthodes de travail de Budé. Outre combler une lacune majeure dans notre connaissance de l’œuvre de l’humaniste parisien, cette recherche amène à reformuler les axes de la biographie de dé, en mettant en évidence son travail de longue haleine sur l’ensemble de la littérature grecque, ce dont les Commentaires représentent l’aboutissement et la maturité.