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1596, encore une année difficile pour Théodore de Bèze, mais intéressante. Le roi Henri IV, embarrassé dans une guerre incertaine contre l'Espagne, a laissé tomber le projet de paix avec la Savoie, dont dépend la paix pour Genève. La ville et son Académie ne sont certes pas désertées, les étudiants étrangers affluent, mais on peine à trouver des professeurs pour l'hébreu et la théologie. Bèze n'enseigne plus et ne peut presque plus sortir de chez lui. Mais il ne cesse pas d'être habité par l'Europe entière; l'Allemagne surtout, riche en théologiens turbulents. Piscator, un vieil ami, maintient ses opinions particulières sur la justification. Bèze s'indigne contre cet individualisme éhonté. Voilà une manière d'oublier l'Eglise, qui appartiennent la vraie et unique doctrine, le dépôt de la foi (il s'agit, bien sûr, de l'Eglise orthodoxe réformée). En France, les "moyenneurs" croient leur heure arrivée, mais Bèze veille et publie une grande réponse à Palma Cayet. Il a ussi préparé une nouvelle édition de son Nouveau Testament in-folio, et aussi de ses poèmes. A propos de poésie néo-latine, ce volume contient une bien curieuse lettre de 20 pages de Melissus Schedius, proposant des corrections de versification aux vers de Bèze. Le document qui la conserve est déchiré: par qui ?
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L’année 1595 n’a pas été facile à vivre : pour Bèze, à qui le grand âge impose retraite et maux à soigner, pour Genève, qui n’est plus en guerre mais n’est pas encore en paix : la cité connaît un régime de trêves qu’il faut renouveler tous les trois mois, avec le risque que l’ennemi réussisse un coup de main inattendu, et pour la France, où les protestants ont tendance à se plaindre du roi nouvellement converti, qui les oublie et néglige... On voit Bèze dans le rôle politique que Henri IV lui a confié : apaiser les humeurs des huguenots. Il met aussi son point d’honneur à décourager les « moyenneurs » (ceux qui, à la suite du roi, voudraient réconcilier catholiques et protestants, au risque d’ébranler la bonne doctrine). Il faut enfin canaliser l’ardeur de certains jeunes théologiens qui veulent, tels Raphaël Egli, lancer de nouvelles explications de la justification. Un ensemble de documents historiques nouveaux et variés.