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Philippe Glardon relève un événement particulier et largement mésestimé de l’histoire du regard qu’a posé l’homme sur la nature : la parution, en l’espace de trois décennies, entre 1530 et 1560, de dizaines d’ouvrages d’histoire naturelle inédits, alliant de riches descriptions d’espèces végétales et animales à des centaines de gravures originales.
Sur la base de ce constat, il analyse le contexte d’élaboration de ces ouvrages, rédigés le plus souvent en latin, et de leurs traductions. Leur dette envers les textes antiques est départie de l’héritage de la culture médiévale. La problématique du lexique et de la syntaxe des langues antiques comme vernaculaires est étudiée, ainsi que considérés les destinataires respectifs des diverses versions.
L’examen méthodique de La nature et diversité des poissons de Pierre Belon, retranscrite en annexe, et de sa version latine, sert de fil conducteur à l’analyse et amène l’auteur à tirer un bilan novateur sur les v©ritables objectifs de l’histoire naturelle au XVIe siècle, laquelle reflète de manière complexe les interrogations humanistes sur la place de l’homme au sein de la création, en un moment d’effervescence dans l’histoire religieuse et intellecuelle de l’Europe.
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Depuis les années vingt, on n'a plus guère parlé de Pierre Belon, comme s'il fallait se satisfaire de l'image que nous a laissée l'histoire des sciences du siècle passé, portrait lisse, incorruptible, figé dans le panthéon des précurseurs. Belon passait alors sans transition du statut d'escroc, de plagiaire et d'illettré (chacun sait la virulence des critiques que lui adressèrent ses contemporains) à celui de découvreur inspiré de la taxonomie et de l'anatomie comparée. La démarche de l'auteur a pour but, dans une perspective historique, de réexaminer la pertinence des accusations proférées contre Belon, au travers de l'analyse systématique de son oeuvre. On verra ainsi se dessiner les rapports entre ses écrits et les textes des naturalistes que Belon a connus ou utilisés, en particulier ceux d'Edouard Wotton, Conrad Gesner et Guillaume Rondelet. Ce dernier se révélera même, au fil des préfaces acerbes, être un ennemi juré de Belon. Une lecture attentive permettra aussi une démarche épistémologique autour des motivations d'un naturaliste du XVIe siècle, trop vite comprises comme purement zoologiques selon notre division des catégories du savoir. Enfin, les notes devraient apporter un éclairage neuf sur les espèces détaillées, leurs appellations françaises, vernaculaires et antiques, l'identification des quelque cent cinquante gravures qui les illustrent, et toutes les remarques médicales, gastronomiques ou cynégétiques qui émaillent les descriptions.