Sous le nom d'Hérodiade, Stéphane Mallarmé fusionnait en 1864 le personnage de la danseuse Salomé et celui de sa mère qui, selon l'anecdote biblique, avait exigé la décapitation de Jean Baptiste. C'est à cette figure féminine que le poète devait ses plus vifs éblouissements, ceux sur lesquels il allait édifier toute sa vision de l'œuvre à venir. Mais c'est à elle qu'il devait aussi de violents symptômes, assiégeant si fort son souffle et sa raison, qu'il dut se détourner de cette œuvre où il s'était "mis tout entier sans le savoir". Il y revint trente ans plus tard et laissa un volumineux dossier, Les noces d'Hérodiade. Mystère. Il apparaît que Mallarmé, en creusant la genèse de la parole poétique, n'a cessé d'approfondir la question de la génération sexuelle, et que chez lui l'espace pneumatique et l'espace matriciel s'interpellent toujours secrètement. A leur croisée, Hérodiade met en jeu la problématique de la virginité, sur laquelle la réflexion mallarméenne jette un regard qui éclaire non seulement notre compréhension du féminin, mais aussi celle du désir qui meut tout rapport, poétique ou amoureux.