Renaissance
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Les relations entre les traités démonologiques et la littérature, aux XVIe et XVIIe siècles, sont l’objet de ce volume. Il comprend aussi quelques développements, en amont – saint Augustin – et en aval – Léo Taxil et Collin de Plancy. Ces rapports concernent les transferts entre démonologie et littérature ainsi que les stratégies d’écriture des démonologues, souvent conscients de leurs effets. L’ouvrage questionne aussi le rapport de la démonologie à la fiction; la démonologie, à travers le débat qu’elle suscite, a en effet puissamment contribué à brouiller et à redéfinir la limite entre le possible et l’impossible, le vrai et le faux. Tel est l’enjeu majeur, dans l’histoire de la pensée au seuil de la modernité, de la «fiction de la sorcellerie», dispositif d’emprise dont la littérature capte la séduction et dont elle renforce aussi parfois l’efficacité.
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«L’Apologie pour Herodote», publiée en 1566, n’offre pas seulement au lecteur une foison d’histoires constitutives d’une enquête anthropologique; elle présente un réquisitoire contre toutes les formes d’abus et de tromperie, celles auxquelles s’adonnent les marchands, les médecins, les gens de justice, et plus encore les clercs. Henri Estienne dénigre la superstition des catholiques telle qu’elle s’exprime dans leurs livres, mais il s’en prend aussi à la messe, à l’invocation des saints, au culte des images et des reliques. Sa dénonciation rallie le combat que l’humaniste mène contre la sottise avec les armes de l’esprit. Au-delà de la diatribe, «L’Apologie» est aussi une réflexion sur l’Histoire, qu’Estienne entend libérer de l’exemplarité et qu’il conçoit comme une science du concret. L’érudit se fait ainsi le peintre du temps présent et confronte à la connaissance des mœurs antiques l’observation immédiate des comportements quotidiens. Nouveau Démocrite, Henri Estienne se distingue par une écriture de l’ironie qui rapproche le lointain et met à distance le familier.
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Réunissant plus de cent trente lettres et fragments de lettres de la correspondance privée et diplomatique de l’humaniste toulousain Jean de Pins, Jan Pendergrass ouvre une perspective unique sur quelque quarante ans d’histoire française et européenne. Humaniste, juriste, diplomate et homme d’Eglise sous les règnes de Louis XII et François Ier, de Pins fit de longues études en France et en Italie du nord avant de devenir, tour à tour, sénateur aux Parlements de Toulouse et Milan, puis ambassadeur français à Venise et à Rome. Consacré évêque de Rieux en 1524, il se démit de ses fonctions parlementaires et finit ses jours à Toulouse, entouré d’étudiants et de gens de lettres épris de littérature classique. Cette édition de sa correspondance révèle l’étendue considérable de ses rapports, non seulement avec les représentants de l’humanisme européen, mais aussi avec les chefs de la diplomatie française, avec des parlementaires, des gens de loi et d’Eglise exceptionnels.s.
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L'essor pris par l'imprimerie et le livre illustré à Lyon au XVIe siècle est aujourd'hui pleinement établi, ne serait-ce qu'au regard de l'œuvre d'un Bernard Salomon. Néanmoins, le rôle qu'y joue la gravure sur cuivre, d'évidence considérable compte tenu des estampes conservées, demeurait méconnu. Sur la base de ce constat, Estelle Leutrat étudie un centre de production de la gravure en taille-douce qui fut parmi les plus actifs en France de 1520 à 1565 environ. Son corpus réunit principalement les estampes du Maître JG (autrefois identifié à Jean de Gourmont), de Georges Reverdy et du Maître CC, dont la production respective atteste à sa manière des débats intellectuels et religieux de l'époque. L'intérêt que porte l'auteur aux pratiques des graveurs, depuis les techniques de taille jusqu'au choix des modèles, confirme une fois encore la large circulation de formes entre la France, l'Italie et les Pays du Nord.
L'étude de ces œuvres, qui connurent un rayonnement européen, enrichit profusément notre connaissance de la vie artistique lyonnaise au XVIe siècle.
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Ingeborg Jostock explore le champ, encore largement méconnu, du contrôle de l’imprimerie à Genève, de la censure des lecteurs et de la politique éditoriale des autorités de la cité. Son analyse des sources, et notamment de dossiers particuliers, fait surgir les rapports de force et les négociations permanentes qui opposent le pouvoir civil et l’autorité religieuse.
Au-delà des questions de suprématie, l’ouvrage rend compte des contraintes diplomatiques et commerciales dont il faut admettre qu’elles relèguent fréquemment les priorités idéologiques. De choix profondément contradictoires se dégage néanmoins une logique, celle d’une censure négociée par des acteurs aussi différents que les magistrats, les pasteurs, les imprimeurs et libraires et qui cherchent à se concilier des pouvoirs extérieurs, en France notamment.
Enfin La Censure négociée constitue un remarquable instrument de travail grâce à ses annexes qui éditent l’intégralité des textes réglementaires relatifs au contrôle de l’imprimerie ainsi qu’à la liste annotée des ouvrages interdits ou corrigés qu’elle donne.