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La longue vie du marquis de Bombelles, né en 1744 sous le règne de Louis XV, s’achève au début de l’année 1822. Son Journal, tenu quotidiennement de 1780 à sa mort, est la chronique de ce presque demi-siècle.
Le huitième et dernier tome de ce journal, qui couvre les années 1815 à 1822, aurait dû être le temps de la sérénité : la patrie retrouvée, la monarchie restaurée, la famille rassemblée. Il a surtout été le temps du désenchantement ; le marquis n’a pas reconnu, en 1815, le pays qu’il avait quitté en 1789 ; la cour de Versailles ne s’est pas reconstituée ; le roi lui-même n’est plus que l’ombre du souverain imaginé par le marquis. Sans doute Bombelles nous livre une vision nostalgique de ces années, mais aussi un récit vivant et fidèle du temps.
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« Le Journal commencé par Bombelles le jour de la naissance de son fils aîné (1er juillet 1780) pour l’instruire, le former, lui transmettre le meilleur de son expérience et de ses lectures, devient peu à peu, sans perdre son premier objectif, dune part un compte-rendu des événements quotidiens, d’autre part une sorte de tribune pour un public élargi : les enfants nés ensuite et peut-être une postérité plus lointaine. […] C’est un document d’ordre privé, consignant des lettres,des discours, des articles de périodiques mais jamais des dépêches diplomatiques. Tous les soirs, debout devant son pupitre, le marquis écrit quelques lignes ou quinze pages, selon son loisir et l’intérêt du sujet. […]
Nous demandons au lecteur de ce premier tome de ne pas attendre merveille dès le début. C’est la naissance d’un fils – origine de l’œuvre, mais, historiquement, incident minuscule ; c’est Ratisbonne, sa société figée, ses ragots, la place qu’y tient le ministre de France et ce qui le déçoit. Tout cela n’a rien de passionnant mais, raccourci au maximum, deviendra essentiel pour la compréhension du personnage et de son temps. Les violons s’accordent, la salle se remplit – de gens qui reviendront souvent ; des échos s’échangent – dont certain marqueront l’esprit du narrateur ; le rideau frémit et soudain se lève : c’est la vie de la Cour à la fin du règne de Louis XVI, ses personnages importants ou pittoresques, le train des jours, des fêtes, des intrigues ; c’est la douceur de vivre, brillante et traversée d’orages, pleine de défauts et d’attrait. »
Extrait de l’introduction
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Le cinquième tome du Journal du marquis de Bombelles donne à voir les pérégrinations d’une famille d’émigrés entre 1795 et 1800. Installés à Ratisbonne, les Bombelles fuient la progression des armées françaises et trouvent difficilement un refuge dans la petite ville de Brünn en Moravie, " cul-de-sac " de l’Europe, où le marquis connaîtra l’ennui, l’oisiveté et l’hostilité des autorités autrichiennes. Ces années signent le terme de la Révolution et, d’emblée, le retour de nombreux émigrés. Rien ne peut fléchir la foi monarchique de Bombelles, même si les chances d’une restauration du roi semblent s’éloigner, alors qu’un nouveau venu fait une apparition fulgurante sur la scène politique, le général Bonaparte. La plus cruelle épreuve pour le marquis sera la mort de sa femme en septembre 1800. A ce drame personnel s’ajoutent l’agonie du corps de Condé auquel il avait tenté de s’agréger, les soucis financiers et l’avenir compromis de ses fils.
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Voici le quatrième tome du Journal tenu par le marquis de Bombelles depuis 1780, date de la naissance de son fils aîné. Les deux premiers tomes évoquaient la vie de cour à Versailles, les débuts heureux d’une brillante carrière d’ambassadeur de Louis XVI; le troisième tome s’ouvrait sur l’année 1789 et l’écroulement des espoirs du marquis que nous retrouvons, dans ce quatrième tome, émigré avec sa famille sur les bords du lac de Constance en Suisse, avant de fuir vers Ratisbonne. Appelé à juger en historien les mémoires de Bombelles, le professeur Marcel Reinhard avait écrit: «L’intérêt du document de base est hors de doute… Le résultat [de coupures opérées dans le texte initial] fournit un récit distribué en notations journalières tantôt brèves, tantôt plus étendues, toujours allégées et toujours fidèles à la diversité des observations du rédacteur. Ainsi défilent personnages et groupes, familiers de la Cour et des princes, monde des ambassades, remarques et réflexions sur la diplomatie, la politique, les prix et l’économie, la famille et la vie quotidienne, en somme tous les aspects qui intéressent historiens et lecteurs.» Au cours des années 1793-1795, les plus cruciales de la Révolution, Bombelles s’est mué en contre-révolutionnaire intransigeant, mais porte toujours dans son exil, le même jugement pénétrant sur les événements de la France révolutionnaire, les coteries d’émigrés qu’il côtoie, les intrigues diplomatiques et la vie des cours des principautés allemandes de cette fin du XVIIIe siècle.
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Le Marquis Marc de Bombelles a été ambassadeur de France auprès de la Diète impériale d'Allemagne à Ratisbonne, puis après la Révolution, évêque d'Amiens. Il a donné un vaste journal (90 volumes manuscrits) dont c'est ici le second volume publié. L'édition princeps que nous publions donne les passages les plus intéressants, et à la fin de chaque volume, une analyse de ceux qui n'ont pas été retenus. Le tome I est paru en 1977 et couvrait les années 1780 à 1784. (Rappel : Tome I (1790-1784,-. Grand Prix de l'Académie de Versailles). Ce deuxième tome couvre la période 1784 à 1789.
Après cinq mois de voyage dans les Iles britanniques, Bombelles revient à Versailles, où il obtient l'ambassade du Portugal. Après un séjour d'un an et demi à Lisbonne, il reviendra à Versailles, à la veille de la Révolution. Il souligne alors dans son journal les fautes du gouvernement et s'indigne des facilités offertes à l'effervescence générale : "Nous n'aurions pas trop des talents de Richelieu, de la vertueuse énergie de Sully et de l'astuce de Mazarin pour tirer le Roi des mains dans lesquelles il s'est mis. Je compte plus sur les fautes, sur l'excès de la démence de ses ennemis que sur la suffisance des moyens employés au rétablissement de la Paix et de l'autorité du Roi". Outré de ce qu'il voit et prévoir, il partira pour Venise dont il a entre-temps accepté l'ambassade. C'est la fin de la jeunesse, la fin d'une cour, la fin d'un monde.