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Cilices, haires, disciplines sont les instruments oubliés d’une macération de la chair omniprésente dans le catholicisme tridentin, mais devenue complètement anachronique aujourd’hui. Chez les carmélites déchaussées de Thérèse d’Ávila qui sont au coeur de cet ouvrage, comme dans d’autres ordres religieux qui se caractérisent par leur austérité, on se flagelle avec vigueur et en déployant des trésors d’ingéniosité pour accroître ses peines, on ingère des immondices pour signifier sa déchéance, on fait couler le sang en abondance pour se réclamer de l’imitatio Christi, ou pour édifier ou impressionner les autres. Loin de vouloir mettre en avant les pires images de la légende noire espagnole, ce livre s’attache à dégager les logiques spirituelles, culturelles et sociales de ce dolorisme assumé mais complexe et contradictoire.
A rebours des interprétations traditionnelles, cet ouvrage propose une lecture inédite du rapport d’Erasme à l’histoire. C’est sur le mode dramatique que Marie Barral-Baron envisage la manière dont Erasme vit l’histoire de son temps. Enthousiaste à l’idée de faire renaître les temps apostoliques, temps bénis du christianisme, il en oublie les réalités de la continuité historique. La brusque irruption de Luther, qui brise soudainement son rêve d’un nouvel âge d’or, lui permet de prendre conscience de sa tragique méprise. Bien involontairement, il a favorisé la rupture d’une unité chrétienne à laquelle il tient plus que tout, anéantissant ainsi lui-même ses propres espérances. Lorsqu’il en prend conscience, il corrige ses textes et révise son appréhension du temps, mais cette course contre la montre est perdue d’avance. Erasme sombre alors dans l’enfer de son propre échec, terrifié à l’idée d’avoir été abandonné par Dieu et confronté à la cruauté de l’histoire. l’histoire.
Ce livre propose une réflexion sur la culture de l’écrit de combat, désigné par le terme contemporain libelle, qui se met en place pendant les guerres de religion. Il cherche à saisir, à travers l’étude des choix d’écriture et de publication des libelles, les représentations de leurs producteurs sur les finalités et les modalités de l’action usant de l’écrit. Les procédés de la désignation et de la mise en accusation d’un ennemi ou encore ceux de la défense face à une attaque infamante, la raison d’être du libelle, sont analysés dans un cadre normatif autant que dans celui des pratiques sociales, religieuses ou littéraires investies par le politique. Cet ouvrage montre que l’argumentation, les exemples mais aussi les modes de diffusion de l’écrit sont adaptés en fonction des circonstances, des destinataires et des objectifs visés bien plus qu’en fonction des idées abstraites, afin de garantir à cette production une efficacité immédiate, parfois au détriment même de la cohérence générale du discours d’un parti. Si les acteurs de poids doivent être persuadés en premier lieu, les auteurs cherchent à inciter tous les lecteurs à participer activement à la diffusion de leurs arguments, notamment grâce à la mise en scène de personnages exemplaires raisonnant en privé sur les affaires publiques.
En s’appuyant sur la culture humaniste et historique des robins du XVIe siècle, Marie Houllemare étudie « l’esprit » d’une institution, c’est-à-dire la manière dont des acteurs l’animent en faisant jouer principes et pratiques institutionnelles. Il s’agit de saisir, à travers les paroles et les écrits des gens de justice, l’art qu’ils déploient à des fins d’établissement de l’autorité et de la légitimité du parlement, dans le dialogue avec le monarque et les avocats. L’usage des catégories rhétoriques permet d’appréhender l’histoire politique, judiciaire et sociale à travers la mise en scène autoréférentielle des gens de justice quand ils cherchent à convaincre un public dans une prise de décision. Ils mettent en œuvre des modèles politiques variés : le parlement est tour à tour considéré comme un sénat, comme un théâtre, comme un temple de justice ou encore comme un forum. Dans ces multiples représentations, le parlement, dont l’activité vise au maintien de la concorde sociale, participe activement de la mise en scène rituelle de l’État moderne.
Le parlement de Paris, voix de la « raison », a-t-il réussi à se faire entendre en ce XVIe siècle de luttes civiles et religieuses, alors que se déchaînaient les passions les plus irraisonnées ? C'est à cette question que répond Sylvie Daubresse en suivant les réactions du Parlement aux événements qui ont marqué les premières guerres de Religion en France. L'attitude du Parlement à l'égard de la politique religieuse et des exigences financières de plus en plus lourdes du pouvoir royal, engendrées par la « nécessité » de la guerre, est examinée dans le détail. L'étude apprécie les fondements théoriques et symboliques du pouvoir comme les pratiques de la première cour souveraine du royaume. Elle est centrée sur l'enregistrement des édits royaux et l'expérience du droit de remontrances, dont les sources sont principalement manuscrites, mais s'appuie également sur des sources imprimées comme les traités politiques et juridiques, la correspondance diplomatique, les chroniques contemporaines. Pendant cette époque troublée de l'histoire de France, le parlement de Paris et le gouvernement royal, malgré quelques heurts, arrivent généralement à des solutions de compromis qui sont les signes d'un travail de conciliation et de dialogue permanent. Ainsi l'auteur peut-elle démontrer que, si l'univers politique de la fin du XVIe siècle est animé par la violence et la contrainte, il est aussi fait de persuasion.
Les hommes du temps d’Henri III dénonçaient souvent dans leurs écrits les «practiques» et «menées» du roi et des grands, qualifiant ainsi des agissements ou des comportements dissimulés, faits de ruse, de théâtralité et de duplicité qui corrompaient les relations d’amitié, de fidélité et d’obéissance. Si le temps des troubles de la Ligue fut celui de la violence, il fut aussi celui de la persuasion: les princes tramaient et défaisaient incessamment toutes sortes d’entreprises en «jouant» de leur influence. C’est à «ces grandz qui ne font traffique que de simulation», qui cachent leurs desseins derrière les masques de leur visage, que cette étude s’intéresse. Elle aborde les techniques de l’influence, les usages ambivalents du langage, les comportements équivoques destinés à persuader ou à tromper autrui. Elle s’attache à mettre en situation l’action et les propos du souverain et des gentilshommes dans le cadre concret de quelques affaires politiques analys©es dans le détail. Fondée principalement sur des sources épistolaires ou des relations écrites au plus près des événements, elle tente de restituer l’ambiance d’un univers politique de la fin du XVIe siècle traversé par la rumeur qui, souvet manipulée, changeait et influençait sans cesse leurs décisions ou leurs actions. Le pouvoir et la puissance politique reposaient aussi sur la force des apparences.