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M. Nykrog, médiéviste éminent, nous fait bénéficier de son expérience incomparable, en retraçant l’histoire de la critique des romans de Chrétien de Troyes : ce qu’on en sait sûrement – et c’est peu de chose – et ce qu’on en a dit – une bibliothèque. M. Nykrog en conclut que les textes de Chrétien ont besoin d’une “cure de simplicité”. Voici comment il fonde son jugement: “Dans le cas de Chrétien on trouve une même réaction depuis Hartmann et Wolfram jusqu’aux lecteurs du XXe siècle : les contemporains qu’on connaît se sont livrés à ce que de nos jours on appellerait une lecture interactive, intervenant pour éclairer, compléter, encadrer; les lecteurs modernes analysent, démontent, interprètent et se battent avec lui dans tous les sens. L’on pense à la formule de Michel Leiris, ‘la littérature comme tauromachie’, seulement ici la ‘minute de vérité’ se refuse à venir, le taureau reste toujours aussi guilleret sur ses jambes, et ce sont des matadors qui jonchent l’arène. La raison pourrait être qu’il n’y a pas de réponse définitive, que le mot de l’énigme est l’énigme elle-même; autrement dit que Chrétien de Troyes est un romancier qui voulait être et rester discutable.
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