Vers 1353, Pétrarque reçut de la part de l’ambassadeur byzantin en Italie un manuscrit grec d’Homère. Cet événement mit fin à une absence plusieurs fois séculaire des épopées homériques en Europe occidentale, même si la légende de la guerre de Troie et des errances d’Ulysse était connue au public médiéval par le biais de sources latines et vernaculaires. Cette étude se propose de tracer le retour des épopées homériques, lui-même étroitement lié au développement de l’hellénisme, à la conscience occidentale. Grâce à l’imprimerie, le texte grec d’Homère est devenu disponible dès 1488, et même avant cette date des traductions latines de l’Iliade avaient vu le jour. Néanmoins, le style d’Homère, considéré comme rude et inélégant par ses premiers lecteurs, a de quoi rendre perplexes certains humanistes de l’époque, ce qui ne les empêche pas de voir en lui un poète divinement inspiré. Peu à peu, la res publica litterarum s’y habitue, aidée dans un premier temps par les exilés grecs de Constantinople et les humanistes italiens, ensuite par les humanistes de l’Europe du nord, notamment Philipp Mélanchthon et ses élèves. La première partie de cette étude examine la diffusion de l’Iliade et de l’Odyssée à l’échelle européenne, en identifiant et analysant les éditions, les traductions latines et les commentaires qui paraissent dès 1473 jusqu’à la fin du XVIe siècle. L’interprétation du texte, souvent influencée par les allégeances confessionnelles des commentateurs, reçoit une attention particulière : quelle est l’influence des exégètes anciens sur les humanistes de la Renaissance ? comment est-il possible de réconcilier les idées religieuses et philosophiques de l’a¨de grec avec le christianisme ? La seconde partie de l’étude se concentre sur la réception d’Homère en France, où Guillaume Budé et Jean Dorat ont inspiré des générations successives d’écrivains, profondément influencés par l’esthétiue et par la philosophie d’Homère. En particulier, l’emploi des épopées fait par des prosateurs comme Jean Lemaire de Belges et François Rabelais, et par les poètes de la Pléiade est analysé. Les traductions françaises d’Homère sont également examinées. Enfin, nous voyons Jules-César Scaliger mettre en doute l’esthétique homérique et préparer la voie pour le classicisme du grand siècle. Cet ouvrage est complété par une bibliographie détaillée de toutes les éditions d’Homère imprimées jusqu’en 1600.