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Les diables parcourant les mystères hagiographiques séduisent. Ils séduisent leurs proies, ils séduisent leur public, ils séduisent même les praticiens de la scène médiévale. Leur comique indéniable a longtemps fait oublier le rôle essentiel qu’ils jouent dans la fiction dramatique. Indispensables faire-valoir des saints dont ces mystères chantent les louanges, souffre-douleur des anges, images du mal, de l’adversité et de l’altérité, les diables s’avèrent être des moteurs de l’action théâtrale.
Mis en scène dans des pièces qui tiennent autant du rituel que du divertissement, les diables relaient l’idéologie chrétienne sans renoncer au carnavalesque qu’autorise leur rôle. L’étude que leur consacre Elyse Dupras dévoile les processus de violence et d’exclusion exprimés dans ce théâtre, qui tout à la fois représente et interprète le monde. Dans la rhétorique des mystères, leurs masques, leurs faits et gestes comme le discours qu’ils tiennent contribuent notre connaissance du public médiéval. La fascination qu’exercent les diables tient à leur ambivalence, condamnés sont-ils au mal mais voués à prêcher le bien.