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L’ombre de La Fontaine s’étend si démesurément sur les fables qu’elle a objectivement barré, en amont et en aval, leur horizon critique. Les études réunies dans ce volume, qui constituent les actes d’un colloque tenu à Paris en 2007, explorent l’avant du recueil qui a transfiguré l’apologue et l’a en même temps épuisé : la floraison de recueils qui a préparé au XVIIe siècle l’éclosion du chef-d'oeuvre du genre ésopique, les fabliers humanistes qui les ont précédés et plus avant encore au Moyen Âge les Isopets. Le nom même des premières collections de fables en français souligne leur dette envers les collections gréco-latines dont elles sont lointainement tirées. On trouvera aussi un bilan et un prolongement des travaux importants publiés sur la fable grecque au cours des dernières années, et plus encore sur le domaine latin, décisif pour la naissance du genre ésopique en français : les recueils « classiques » de Phèdre et d’Avianus, ainsi que le champ, plus vaste et plus méconnu, des apologues médio-latins.
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Le mot progrès n’existe pas au Moyen Age. Et le concept de progrès affleure à peine dans la pensée occidentale. Il est d’autant plus intéressant de réfléchir aujourd’hui sur ses premières manifestations, à un moment où le mythe du progrès, triomphant du XVIIIe au XXe siècle, est radicalement remis en question, et de s’interroger sur la variation des idéaux, des idéologies et de leurs champs d’application au cours des siècles.
Au Moyen Age, les cadres mentaux sont peu compatibles avec l’idée de progrès. Pourtant le christianisme donne un sens à l’histoire et liquide le mythe antique de l’éternel retour et la conception cyclique de l’histoire. Mais le mépris du monde implique le mépris du progrès matériel. Le seul but envisageable est le progrès moral, défini comme recherche du salut éternel. L’idée de progrès apparaît cependant dans les mentalités médiévales à travers un jeu d’oppositions, progrès/réaction, progrès/décadence, passé/présent, antique/moderne, qui implique une réflexion dans les registres historique et politique mais aussi éthique et culturel.
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Dans le deuxième tome du Devisement du monde, Marco Polo parcourt le nord de l’Afghanistan et traverse ensuite la Chine septentrionale, en suivant longtemps le chemin des caravanes (route du sud). Les villes citées dans le Xinjiang et dans le Gansu (Kashgar, Yarkant, Khotan, Tcherchen, puis Dunhuang, Jiuquan, Zhangye, Wuwei) sont des étapes obligées de cette antique voie, dite aujourd’hui route de la soie, qui longe ou franchit le désert du Taklamakan, allant d’oasis en oasis à travers maints espaces désolés. Au-delà de Wuwei, Marco Polo semble avoir emprunté un chemin direct par le Ningxia et par le sud de la Mongolie, aux confins du désert de Gobi, sans doute le long du Huang He (Fleuve Jaune), pour atteindre Xanadu, palais d’été du Grand Khan, situé à trois cents kilomètres au nord de Pékin.
Malgré les déserts redoutables, les étendues prodigieuses – cette traversée de la Chine s’étend sur près de six mille kilomètres –, malgré les innombrables périls de cette expédition aventureuse, le voyageur vénitien a atteint son but. Premier explorateur occidental à pénétrer profondément par cette route dans le vaste empire de Khoubilai Khan, il découvre le monde immense et mystérieux de l’Asie.
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Voici le dénouement du roman, de l’invasion du royaume de Logres par le roi Marc au retour solitaire de Bohort à Camaalot, après la fin de la Quête du Graal, en passant par la mort de Tristan et Iseut, de Palamède, de Galaad et de Perceval. Les fils noués entre la Quête du Graal et les aventures de Tristan se dénouent sur la double mort de Tristan et de Galaad. La rivalité des héros, l’affrontement de deux systèmes de valeur inconciliables, mis en valeur par le jeu de l’entrelacement, sont encore prééminents. La fin du roman semble dominée par la figure de Galaad, en chevalier terrien (quand il défait à lui seul l’armée de Marc) ou celestiel, qui multiplie les miracles. Mais la mort des amants compte parmi les plus belles pages du roman, cette mort sans Dieu, qui oppose à l’idéal du Graal une autre transcendance: celle de l’amour.