Renaissance
-
-
Connu comme orateur de la cour papale, Marc-Antoine Muret (1526-1585) fut aussi un pédagogue et un philologue réputé. Publiés en 1552, à une époque où le jeune homme fréquentait les poètes de la Pléiade, ses Juvenilia précédèrent de peu son Commentaire des Amours de Ronsard. Le recueil comprend une tragédie, Julius Caesar, dix élégies, deux satires, cent sept épigrammes, trois épîtres et six odes qui illustrent les préoccupations des arts poétiques contemporains et reflètent les aspirations de la nouvelle génération. Muret exhibe sa virtuosité et son ingéniosité, mais s’inscrit aussi dans le débat sur l’éthique du pouvoir et répond aux exigences morales de l’idéal éducatif humaniste. Virginie Leroux donne une édition critique du recueil, annotée et accompagnée d’une traduction française, ainsi qu’un commentaire qui, genre par genre, identifie les sources antiques et les modèles théoriques. Elle analyse l’influence de l’émulation avec les contemporains et examine les enjeux polémiques induits par l’appartenance à une communauté poétique.
-
-
-
Lors de son séjour en France (de 1495 à 1506), Fra Giovanni Giocondo de Vérone recueillit un ensemble considérable de textes de géométrie pratique. Ces écrits en français présentent aujourd’hui un grand intérêt car les sources de ce type en langue vulgaire parvenues jusqu'à nous sont fort peu nombreuses. L’auteur en donne l’édition critique et s’interroge sur ce qui a pu motiver Giocondo à réunir ces ouvrages. Cela le conduit d’abord à étudier la foisonnante personnalité intellectuelle du frère, à la fois ingénieur, architecte, antiquaire et éditeur de textes anciens, sur lequel les sources sont malheureusement avares. L’œuvre principale qu’on lui connaît est la célèbre édition vénitienne de Vitruve de 1511, d’une grande qualité à maints égards, et la première à avoir été illustrée. L’intérêt de Giocondo pour les textes de géométrie pratique pourrait avoir été inspiré par un goût érudit. Cette hypothèse permet de les parcourir à la lumière de la lecture qui, selon l’auteur, était celle, atypique, de Giocondo.
-
Monument de l'histoire des lettres, objet de controverse à travers les siècles et, dans le même temps, objet fossilisé par la tradition académique, La Deffence, et illustration de la langue françoyse exigeait une nouvelle édition. Le présent travail replace l'ouvrage dans les conditions de sa publication et de sa réception, tente de lui rendre sa déroutante provocation et son originalité foncière. C'est pourquoi l'édition originale de 1549 de La Deffence, avec son orthographe et sa ponctuation primitives, a été choisie. C'est aussi pourquoi au texte même de Du Bellay sont joints le Dialogo delle lingue de Sperone Speroni, sa source cachée, et l'ensemble des documents relatifs à la première réception (polémique) de La Deffence.
-
-
Selon une grille de lecture issue de l’anthropologie, Christian Grosse décrit et analyse la profonde transformation de la culture rituelle chrétienne qu’entraîne à Genève l’adoption de la Réforme. Il démontre que la religion réformée ne remplace pas un christianisme médiéval, fondé sur le rite et sur la dimension collective de l’expérience religieuse, par un christianisme centré sur la dimension intérieure et individuelle de cette expérience ; elle substitue à un système rituel cohérent et englobant, dont la messe constituait le cœur, un autre système rituel, dont la cohérence repose sur la complémentarité de la prédication et de la communion. Combinant des approches chronologiques et thématiques, les Rituels de la cène réformée à Genève examinent la formation et le fonctionnement de ce système sur deux siècles, soit des années de révolution iconoclaste qui préparent l’abolition de la messe en 1535, à l’orée du XVIIIe siècle, quand une série de réformes met fin à la continuité d’une tradition fondée sur la forme des prières ecclésiastiques, le formulaire liturgique calvinien édité pour la première fois en 1542.
-
Héritières de l’Académie de Platon et de la réflexion de Pétrarque sur le loisir lettré, cénacles d’érudits et d’artistes sous la protection de puissants mécènes, les premières académies italiennes et françaises constituent l’un des cadres privilégiés du renouveau philologique, artistique, philosophique et scientifique qui va transfigurer l’Europe de la Renaissance.
Les Académies dans l’Europe humaniste forment le premier ouvrage d’une telle envergure sur le sujet ; il pose un regard neuf sur le mouvement académique en Europe jusque vers 1600, notamment les premières académies italiennes (académie romaine de Pomponio Leto, académie napolitaine du Panhormite, puis de Pontano, académie florentine de Careggi, avec Marsile Ficin), les Académies royales françaises du règne des Valois (Académie de Poésie et de Musique, Académie du Palais) sans oublier d’autres organisations contemporaines moins connues. Des recherches documentaires présentent le personnel des divers groupes et les œuvres où s’expriment leurs idéaux. L’observation des rapports qu’elles entretiennent permet de définir la forme et les activités de chaque institution ainsi que la nature de leur contribution à l’extension des savoirs : enrichissement de la philologie classique, de la poétique, de la rhétorique, constitution de dictionnaires ou de répertoires linguistiques, archéologiques ou iconographiques, réflexion sur les arts à la lumière des traditions chrétienne ou néo-platonicienne, ambitions pédagogiques ; se dégage aussi le rôle majeur de la musique dans plusieurs académies. L’étude des liens matériels et idéologiques entre ces sociétés et les Grands (papes, rois, mécènes) donne enfin de mesurer la « libert© » dont jouissent les académies, particulièrement dans leur vocation encyclopédique et européenne.
-