Renaissance
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De 1544 à 1560, la vogue du recueil amoureux pétrarquien signe la naissance d’un véritable genre, doté d’une poétique propre : les « Amours ». Avec Délie, L’Olive et les diverses Amours de Ronsard et de ses amis, ce ne sont pas moins d’une trentaine d’œuvres dont cette étude séminale montre pour la première fois la cohérence, le mode de fonctionnement et les enjeux littéraires et politiques. Ressuscite alors une facette inattendue de la poésie amoureuse : sa dimension collective. Du modèle explicite, Pétrarque, aux sources inavouées (anthologies italiennes, Marot), la généalogie du genre souligne tout d’abord la nouveauté d’un projet qui, malgré son importation d’Italie, impose une poétique de la variation spécifiquement française. La genèse des œuvres de Ronsard, Le Caron, Du Bellay, Tyard et Des Autels perce ensuite l’idéal esthétique de ces formes paradoxales, une et discontinues, et détaille les ressorts de cet art de la marqueterie. Enfin, la poétique des recueils montre comment œuvres et genre se structurent par imitation et différence, créant des codes et un canon nouveaux qui réalisent en pratique le programme collectif de la Défense et Illustration de la langue française.
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La maternité, qu’il s’agisse de la génération, de la grossesse, de l’accouchement, de la stérilité ou des naissances « monstrueuses », fascine la Renaissance. Aussi, à l’âge de l’imprimerie, les traités d’obstétrique en langue fran§aise connaissent un succès remarquable, accélérant la diffusion des connaissances scientifiques. Valérie Worth-Stylianou examine cette histoire du livre médical en recensant les éditions d’une trentaine d’ouvrages, depuis la première version rançaise du manuel d’Euchaire Rösslin parue en 1536 jusqu’au pamphlet polémique de Louise Bourgeois – la première sage-femme à se faire imprimer – en 1627, en passant par des traités de chirurgiens ou de médecins célèbres tels Ambroise Paré, Laurent Joubert et Jacques Guillemeau. Quels sont les ouvrages qui bénéficient d’une circulation décisive ? Le choix de les publier en français, alors que le latin demeure le langage médical, n’implique-t-il pas une vulgarisation contestable de secrets réservés aux seuls hommes de l’art ? Qu’en est-il alors des querelles sur la double semence, la durée de la grossesse, et la génération des hermaphrodites ? Si ces textes réfléchissent les débats entre médecins et chirurgiens, hommes de l’art et sages-femmes, n’est-il pas remarquable qu’avant même l’ère des grands accoucheurs que seront Mauriceau et Portal, les auteurs les plus avisés s’acharnent surtout à enseigner le moyen de réduire le taux effrayant de la mortalité maternelle et enfantine ? Le corpus constitué comprend le texte annoté des préfaces, une bibliographie critique, la biographie et une analyse de l’apport de chaque auteur, ainsi qu’une centaine d’illustrations.
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La B.I.H.R. est le fruit de la coopération internationale entre dix-huit pays où la Fédération est représentée (pour l’Europe : Allemagne, Belgique, Bulgarie, Espagne, France, Grande-Bretagne, Grèce, Hongrie, Italie, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Roumanie, Suisse ; sur les autres continents : Amérique hispanique et Brésil ; Etats-Unis d’Amérique, Japon). Chaque contributeur procède, année après année, au recensement de tout ce qui a paru dans son pays, à savoir les monographies et les articles contenus dans des revues et des collectifs (mélanges, actes de congrès, etc.), à l’exception toutefois des comptes rendus. La Rédaction centrale se charge de collecter les différentes contributions en vue d’une publication annuelle. Les termes Humanisme et Renaissance y sont entendus dans leur sens le plus large; ils embrassent toute l’activité humaine – économique, juridique, scientifique, technique, littéraire, philosophique, religieuse, artistique, au cours des XVe et XVIe siècles. Nous avons toutefois conservé une certaine souplesse à ces limites chronologiques, compte tenu du développement asynchrone de ces mouvements culturels dans les différents pays concernés.
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En août 1545, un an après la publication de Délie, sortaient des presses de l'imprimeur Jean de Tournes les Rymes de gentile et vertueuse dame D. Pernette Du Guillet Lyonnoise. Ce mince ouvrage posthume fut composé sur « les instantes, et affectionn©es remonstrances de son dolent mary » par Antoine du Moulin qui recueillit les « brouillars » de Pernette destinés à être « en grande admiration leu[s] de tous ». Parangon vertueux, comme le proclament l'ensemble des paratextes ? En cultivant lavariété au fil de pièces fines et vives dont Elise Rajchenbach donne l'édition, les Rymes offrent surtout l'occasion de relire d'une voix légère les codes de la poésie amoureuse. C'est en effet à une définition renouvelée des rapports littéraires et amoureux que se livrait celle couramment identifiée à Délie, quand elle n'hésitait pas à répliquer :
Je dy, combien que n'aye le sçavoir,
Ne les vertus, que ton R, m'advoue,
Qu'errer je fais tout homme, qui me loue.
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Education, Transmission, Rénovation à la Renaissance regroupe les actes d'un colloque organisé du 3 au 6 décembre 2003 par le CRCI (Centre de Recherche sur la Circulation des Idées) et le GADGES (Groupe d'Analyse de la Dynamique des Genres et des Styles). La double approche philosophique et littéraire, sous le patronage de Madame Jacqueline de Romilly qui ouvre les travaux, s'intéresse à la permanence de l'humanisme à travers sa dimension la plus fondatrice, l'éducation. Éduquer, transmettre, rénover, tels ont été les maîtres mots d'une réflexion destinée à éclairer le débat actuel sur l'humanisme. Que partageons-nous avec les humanistes de la Renaissance ? Peut-être une même expérience de la rupture dans l'éducation et dans sa transmission. L'imprimerie et Internet bien sûr, chacun en leur temps, conduisent à penser cette transmission comme un enjeu spirituel et intellectuel central. La puissance de la nouveauté, il faut se l'approprier et l'articuler avec les ressources du passé. L'humanisme est riche de toutes ces réformes, rénovations, retractatio et repastinatio, et autres formes de restitutions qui n'expriment que le libre exercice d'un pouvoir critique qui seul permet à une culture née dans des conditions données de formuler une prétention à l'universalité.
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Les trois libelles rassemblés ici - le troisième, Response à un plaidoyer, était resté inconnu jusqu'à présent - doivent être attribués à Calvin. Ils manifestent son grand talent littéraire et sa maîtrise de la langue française. Journaliste pamphlétaire, réactif aux événements du moment, autant que théologien réformateur, Jean Calvin y déploie une verve improvisée, directement liée à l'actualité, mais qu'il marque des constantes de son style, immédiatement identifiable. Francis Higman et Olivier Millet, parmi les meilleurs spécialistes actuels de Calvin, ont établi de manière définitive la paternité du Réformateur sur ces textes. Ils en donnent une édition critique en tout point exemplaire.
Francis Higman est l'ancien directeur de l'Institut d'Histoire de la Réformation de Genève. Olivier Millet est professeur de littérature française de la Renaissance (Paris 12).
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Les Ducs de Nevers et l'Etat royal ne se réduit pas à une biographie. Ariane Boltanski préfère exhumer le jeu complexe des relations entre ces Grands et l'Etat durant la deuxième moitié du XVIe siècle. Contredisant les postulats de l'historiographie classique, son étude de la maison de Nevers montre que les rapports liant ces feudataires et la monarchie ne se sont pas déployés sur le mode dominant d'un combat fratricide pour le contrôle du pouvoir. Ainsi les Nevers n'ont-ils pas tenté de maintenir leur puissance dans une indépendance précaire en luttant contre la force monarchique ; ils se sont, au contraire, associés au processus même de formation de l'Etat. Pour sa part, le pouvoir n'a pas perçu ces Grands comme de dangereux compétiteurs et, loin de détruire cette maison féodale, il en a assuré la perpétuation, politique, économique et sociale, en l'associant à l'organisation de l'Etat royal. Il s'ensuivit qu'une alliance, fructueuse pour les deux parties, unit alors les Nevers et la monarchie. Elle se fondait sur un ensemble d'accommodements, qui portaient sur le fonctionnement d'un système de pouvoir global, associant la puissance du duc et celle du souverain à travers des échanges généralisés. Ariane Boltanski examine ce système en s'efforçant d'établir quels étaient ses « premiers fondements », puis en évaluant quelle place tenaient les relations de clientèle dans le dispositif. Elle étudie enfin comment il fut éprouvé et évolua, notamment au travers des guerres de Religion.
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Pourquoi insérer dans une œuvre littéraire des listes, qu'il s'agisse de héros épiques, de plantes et d'animaux recensés dans le monde naturel, de realia de l'industrie humaine ? Que l'on songe à Rabelais comme à des auteurs aussi divers que Hugo, Borges ou Perec, et l'on constatera que le phénomène, réitéré, est loin d'être marginal. Il est ancien également : ainsi la pratique massive du procédé depuis le Moyen Age mérite-elle qu'on en interroge les origines. Il est ample aussi : les listes d'œuvres exhibées par des jongleurs en compétition et par des auteurs vantant leur production, les denrées offertes au marché ou nécessaires au ménage qu'inventorient les dits énumératifs en témoignent. Férus de listes, Machaut, Froissart, Deschamps et Villon en déclinent le répertoire, chacun selon sa poétique propre.
L'observation de la pratique littéraire de la liste du XIIe au début du XVIe siècle montre qu'elle est associée à une représentation oxymorique du poète, à la fois fier d'une maîtrise qu'il étale et conscient de limites qu'il établit. Celles-ci, en effet, le rapprochent dangereusement du ménestrel, mais aussi du marchand et du bonimenteur, puisque, à leur image, il se livre à un arpentage du monde pour faire commerce de mots dans un étalage de savoir encyclopédique et lexical.
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L'année 2004 a été notamment marquée par le trois centième anniversaire de la mort des deux plus grands prédicateurs français Jacques-Bénigne Bossuet (1627-1704) et Louis Bourdaloue (1632-1704). Poursuivant ses recherches sur la dynamique des genres, le GADGES publie les actes du colloque tenu à Lyon en octobre 2004 sur l'éloquence religieuse en France au XVIIe siècle. Bien des voies y ont été explorées : on a ainsi montré qu'avant Bossuet, des orateurs de talent avaient ouvert le chemin (Du Perron, saint François de Sales). A l'époque où parlait l'évêque de Meaux s'exprimaient aussi d'autres grands prédicateurs - Bourdaloue, Mascaron, en attendant Massillon, et surtout des prédicateurs protestants. Enfin, plusieurs communications ont été consacrées à l'étude de la théorie et de la stylistique du sermon au XVIIe siècle. Du Temps des beaux sermons se dégage une problématique féconde, en particulier sur les rapports entre la rhétorique et l'éloquence sacrée : la vérité chrétienne nécessite-t-elle le support profane des sortilèges de la rhétorique ? Dans ce monde imparfait, marqué par le péché et le mythe de la Tour de Babel, le prédicateur se voit contraint de situer son propos dans un espace incertain, à mi-chemin entre la transparence et la théâtralisation, entre l'absence et la présence, entre le vide et l'éclat. Assurément, le sermon est l'un des genres les plus fascinants, à la fois objet esthétique et moment liturgique. De cette tension naît un discours à la fois attendu - puisque le contenu est fixé par le dogme catholique ou la familiarité protestante avec la Parole de Dieu - et toujours surprenant, hésitant entre une formulation ornée et une expression véhémente.
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Issu d’une illustre famille de robe, fils du premier président du Parlement de Paris Christophe de Thou, Jacques-Auguste a acquis une stature éminente dans le monde politique et intellectuel de son époque. S’il l’a établie sur une éducation raffinée qui lui donna le goût de la bibliophilie et l’exerça au mécénat, il l’a étayée grâce à une production poétique impressionnante, bien que méconnue de nos jours, et un réseau de relations érudites, notamment avec le triumvirat de lhumanisme tardif (Joseph Scaliger, Juste Lipse et Isaac Casaubon). Il a également joui de relations familiales efficaces et d’une politique nuptiale bien calculée. Il l’aura enfin récapitulée dans les entreprises respectivement commémorative deson œuvre maîtresse, les Historiae sui temporis, et apologétique de la Vita. Ainsi est-ce dans la réorientation de la carrière ecclésiastique jusqu’à la faillite du cursus honorum parlementaire et dans la tragédie personnelle d’un double veuvage que se dessine le néo-stoïcien, le politique, l’ami des protestants, le poète, l’historien, le mémorialiste, cet homme complexe que fut Jacques-Auguste de Thou.