Jean CÉARD
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Le magistrat du parlement de Bordeaux Pierre de Lancre reçut du roi Henri IV mission d’enquêter sur les rumeurs de sorcellerie qui secouaient la petite contrée du Labourd en pays basque. Pendant quatre mois, investi d’une autorité souveraine, il travaille activement à instruire et à juger. De cette rare expérience, Pierre de Lancre publie la recension quelques années plus tard. Son Tableau de l’inconstance des mauvais anges et demons fut certainement un ouvrage remarqué : publié en 1612, il fit, sans attendre la fin du privilège de six ans, l’objet d’une réédition revue et augmentée dès 1613.
Cette nouvelle édition multiplie les additions. Si l’auteur maintient presque inchangées ses références érudites, il approfondit en revanche l’exégèse de sa rare expérience de démonologue, avec le sentiment d’enrichir ainsi cette nécessaire contribution à la connaissance du diable et de ses menées. On croit utile de signaler ces additions à leur place : De Lancre, en serviteur dévoué de l’État, élabore une démonologie concrète fondée sur une vaste et difficile érudition dont l’index fait voir l’ampleur.
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Longtemps ignoré ou plutôt négligé, l’orientaliste Guy Le Fèvre de La Boderie est aussi l’auteur d’une ample œuvre poétique dont les trois livres principaux paraissent la même année, en 1578. Deux d’entre eux sont depuis quelque temps accessibles au lecteur moderne. Voici le troisième. Constatant le succès du Psautier protestant, Guy veut s’« opposer au chant pipeur des Sirènes » en proposant un hymnaire en français, c’est-à-dire en traduisant un ensemble imposant d’hymnes chrétiennes dont beaucoup appartiennent déjà au Bréviaire, mais dont d’autres lui semblent pouvoir contribuer à nourrir la ferveur des fidèles. S’il participe ainsi au puissant renouveau de l’hymnologie chrétienne à la Renaissance, il veut, pour sa part, mettre à son service les multiples ressources de la poésie française et il ne craint pas d’expérimenter des formes et des mètres nouveaux. De plus, convaincu du pouvoir de « la douceur du vers et chant », il formule l’espoir que quelques bons musiciens s’emploieront à donner l’âme à cette poésie comme lui-même lui a donné le corps.
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Avec neuf discours et quatre-vingt-une lettres (conservées dans toute l'Europe), ce volume clôt l’édition critique des discours (1563-1568) et de la correspondance politique et familière (1536-1573) de Michel de L’Hospital, que L. Petris avait entamée dans La Plume et la tribune (Droz, 2002). Il comporte de nombreux inédits, notamment des échanges épistolaires avec Henri II, François II, Charles IX, Catherine de Médicis, Pie IV, Nicolas de La Croix, Marguerite de Savoie, Georg Cracow, etc., complétés par l’édition du testament de Michel de L’Hospital, ainsi que par des textes de Brantôme, Thévet et Turnèbe.
S’y révèlent à la fois une action politique qui œuvre à la coexistence confessionnelle au début des guerres de religion et les pensées plus intimes du chancelier de France, partagé entre l’engagement civil et l’« arriere-boutique » de la retraite et des Lettres. Entre parole rhétorique, échange épistolaire, voix poétique des Carmina et écriture privée des notes autographes, c’est une œuvre majeure et complexe visant à agir sur son temps qui est ainsi mise au jour et qui éclaire les visages de celui qui œuvra et posa en pacificateur.
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En publiant en 1560 ses Histoires prodigieuses, œuvre parmi les plus curieuses et les plus populaires de la Renaissance, Pierre Boaistuau fonde un genre qui, jusqu’à la fin du siècle, aura les faveurs du public : celui du livre illustré sur les monstres et prodiges. S’il prétend instruire et édifier, l’ouvrage cherche tout autant à divertir et à piquer la curiosité ; il traite des illusions de Satan aussi bien que des morts inouïes de puissants personnages, des pierres précieuses non moins que des inondations et des tremblements de terre, des monstres marins autant que des amours prodigieuses. On savait que Pierre Boaistuau en avait dédié une première version à la reine Elisabeth d’Angleterre : la récente découverte de ce manuscrit, somptueusement relié et enluminé, permet à Stephen Bamforth et à Jean Céard d’en donner l’édition critique depuis longtemps souhaitée. L’introduction analyse l’évolution du texte et de l’image ; une bibliographie recense toutes les éditions de l’œuvre, y compris ses continuations et ses traductions, jusqu’à la fin du seizième siècle. L’annotation identifie les sources, souvent dissimulées, de l’auteur et le montre au travail, soucieux qu’il fut de conquérir les lecteurs en leur dispensant les trésors de son érudition et les richesses de son savoir.
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Sophie ARNAUD-SEIGLE,
B.C. BOWEN,
Michel CASSAN,
Jean CÉARD,
Richard COOPER,
Marie-Luce DEMONET,
C. ESCARMANT,
Stéphan GEONGET,
J. HIERNARD,
Mireille HUCHON,
L. JAGUENEAU,
Jelle KOOPMANS,
Claude LA CHARITÉ,
J.-L. LE QUELLEC,
Myriam MARRACHE-GOURAUD,
Trevor PEACH,
Gaspare POLIZZI,
M. RENAUD,
François RIGOLOT,
Titia J. SCHUURS-JANSSEN,
Paul J. SMITH,
D. VEILLON,
Véronique ZAERCHER
Sommaire / Table of contents: Avant-propos: M.-L. DEMONET, "L'effet de terroir"; R. COOPER, "L'Histoire en fête"; G. POLIZZI, "Rabelais, Thenaud, l'île de la Dive et le Quint Livre"; M. MARRACHE-GOURAUD, "Lanternes poitevines;" C. ESCARMANT et J.-L. LE QUELLEC, "La chasse au Bitard des étudiants poitevins"; M. HUCHON, "Rabelais, Bouchet et la Nef des Folz"; S. GEONGET, "Panurge et Xenomanes, Rabelais et Bouchet"; F. RIGOLOT, "Le Labyrinthe du songe-mensonge"; C. LA CHARITE, "De Architectura Orbis et De l'excellence et immortalité de l'ame d'Amaury Bouchard"; R. GORRIS CAMOS "Va, lettre, va (...) droict à Clément"; B. C. BOWEN, "Rabelais, Claude Cotereau et la tranquillité de l'esprit"; P. J. SMITH et T. J. SCHUURS-JANSSEN, "Plus feal que ne fut Damis a Appoloneus"; D. VEILLON, "Le De legibus connubialibus d'André Tiraqueau"; J. CEARD, Rabelais, "Tiraqueau et Manardo"; J. HIERNARD, "Les Germani à l'Université de Poitiers au temps de Rabelais"; M. CASSAN, "Le panthéon des plumes illustres du Poitou"; L. JAGUENEAU, "Polymorphisme et variation lexicale chez Rabelais"; J. KOOPMANS, "Rabelais et l'esprit de la farce"; T. PEACH, T"rois lustres d'édition poitevine"; V. ZAERCHER, "L'écriture à "diverses mains"; S. ARNAUD, "Peut-on attribuer à Jacques Peletier du Mans la paternité des Discours non plus mélancoliques que divers?"; M.-L. Demonet, "Rabelaiseries"; M. RENAUD, "En Poitou, c'est-à-dire nulle part...".
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Stephen Professeur BAMFORTH,
Guy BEDOUELLE,
C. BOLOGNA,
J.-Cl. CARRON,
Jean CÉARD,
M. CLÉMENT,
Bruna CONCONI,
Richard COOPER,
Philippe DESAN,
Franco GIACONE,
Yves F-A. GIRAUD,
F. M. HIGMAN,
Mireille HUCHON,
Eva KUSHNER,
Claude LA CHARITÉ,
Christiane LAUVERGNAT-GAGNIÈRE,
Frank LESTRINGANT,
Daniel MÉNAGER,
Olivier MILLET,
G. PATRIZI,
Trevor PEACH,
Bruno PETEY-GIRARD,
Bruno PINCHARD,
Gaspare POLIZZI,
Olivier POT,
Roy ROSENSTEIN,
J. ROUDAUT,
Michel SIMONIN,
Paul J. SMITH,
P. TORDJMAN,
A. TOURNON,
Ruxandra I. VULCAN,
Véronique ZAERCHER
Sommaire: Avant-propos de F. Giacone; J. Céard, «Hommage à Michel Simonin». Ouverture: R. Cooper, «Cymbalum Mundi: état de la question»; Y. Giraud, «La lettre et l’esprit. Problèmes textuels et éditoriaux autour du Cymbalum Mundi». Histoire de Livres: M. Simonin, «Vol au dessus d’un nid de corbeaux: le prince, les lettres et le Cymbalum Mundi»; Ph. Desan, «La reliure du livre de Jupiter: lecture bibliologique du Cymbalum Mundi»; R. I. Vulcan, «Une cymbale du Cymbalum Mundi, le colportage»; F. M. Higman, «Le Cymbalum Mundi et la censure»; J. Roudaut, «La réception du Cymbalum Mundi: 1538-1824»; F. Giacone, «Une réception du Cymbalum Mundi en Allemagne au XVIIe siècle»; P. J. Smith, «Prosper Marchand et sa “Lettre critique sur le livre intitulé Cymbalum Mundi”»; G. Bedouelle, «Le Cymbalum Mundi au XIXe siècle»; F. Giacone, «D’un livre à l’autre: échos bibliques et théologiques dans le Cymbalum Mundi». Fables, mythes et symboles: J. Céard, «“Dialogues poétiques” ou la mythologie dans le Cymbalum Mundi»; R. Gorris-Camos, «Le bain de Diane: mythe et transmutation dans le Cymbalum Mundi»; M. Huchon, «Dialogue poétique et littérature mercurienne»; C. Bologna, «Lo spirito del Cymbalum Mundi»; F. Lestringant, «L’espace du Cymbalum Mundi»; B. Pinchard, «Un Pantagruélisme des Antipodes? Lecture comparée du Cymbalum Mundi et des mythologies Pantagruelicques»; B. Conconi, «Lettura di due leggende incrociate: Pietro Aretino e l’autore del Cymbalum Mundi»; J.-Cl. Carron, «L’énigme du Cymbalum Mundi: de l’allégorisation subversive au dialogue comique». Dialogue et théâtralité: O. Millet, «Le Cymbalum Mundi et la tradition lucianique»; Ch. Lauvergnat-Gagnière, «Le déguisement dans le Cymbalum Mundi»; B. Petey-Girard, «De l’usage du dialogue dans le Cymbalum Mundi: théâtralité, enseignement, réflexion»; D. Ménager, «L’ironie et l’humour dans le dialogue des chiens (Cymbalum Mundi IV)»; S. Bamforth, «Aspects théâtraux du Cymbalum Mundi»; E. Kushner, «L’inscription du second dialogue dans l’histoire du dialogue à la Renaissance»; V. Zaercher, «Voix et énonciation dans le Cymbalum Mundi»; Sens et non-sens: la parole en question: A. Tournon, «Exégèse par énigmes: l’épître liminaire du Cymbalum Mundi»; G. Patrizi, «I temi “italiani” del Cymbalum Mundi»; T. Peach, «Curiosité et conquête du vide dans le Cymbalum Mundi»; P. Tordjman, «Pour qui sonne la Cymbale? Quelques problèmes concernant le thème de l’efficacité symbolique dans le Cymbalum Mundi attribué à Des Périers»; O. Pot, «Le livre et la parole dans le Cymbalum Mundi: entre hommes et bêtes»; G. Polizzi, «Parole “vide” et parole ‘pleine’: l’«inquiétante étrangeté» du Cymbalum Mundi»; C. La Charité, «Inter pastorem et impostorem: l’augustinisme rhétorique et le Cymbalum Mundi (1537)»; M. Clément, «Le Cymbalum Mundi, un texte cynique?»; R. Rosenstein, «Cervantès et le Cymbalum Mundi: du loquax canum agmen à la rhétorique du silence»; R. Cooper, Conclusions. Appendices: A.W. Caswell, «Le paradoxe contre les lettres est-il un autre pamphlet de Thomas?»; G. Guilleminot, «Le dernier possesseur du Cymbalum Mundi de 1537»; Ch. Clavel et T. Tran Quoc , «Euge Sophos: synthèse de la devise et de l’image».