Renaissance
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1596, encore une année difficile pour Théodore de Bèze, mais intéressante. Le roi Henri IV, embarrassé dans une guerre incertaine contre l'Espagne, a laissé tomber le projet de paix avec la Savoie, dont dépend la paix pour Genève. La ville et son Académie ne sont certes pas désertées, les étudiants étrangers affluent, mais on peine à trouver des professeurs pour l'hébreu et la théologie. Bèze n'enseigne plus et ne peut presque plus sortir de chez lui. Mais il ne cesse pas d'être habité par l'Europe entière; l'Allemagne surtout, riche en théologiens turbulents. Piscator, un vieil ami, maintient ses opinions particulières sur la justification. Bèze s'indigne contre cet individualisme éhonté. Voilà une manière d'oublier l'Eglise, qui appartiennent la vraie et unique doctrine, le dépôt de la foi (il s'agit, bien sûr, de l'Eglise orthodoxe réformée). En France, les "moyenneurs" croient leur heure arrivée, mais Bèze veille et publie une grande réponse à Palma Cayet. Il a ussi préparé une nouvelle édition de son Nouveau Testament in-folio, et aussi de ses poèmes. A propos de poésie néo-latine, ce volume contient une bien curieuse lettre de 20 pages de Melissus Schedius, proposant des corrections de versification aux vers de Bèze. Le document qui la conserve est déchiré: par qui ?
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CHAPITRE PREMIER - DISCOURS PÉRITEXTUELS ET IMAGE D’ÉDITEUR : LA REVENDICATION
D’UNE PATERNITÉ PARTAGÉE
I. Le péritexte, espace de genèse de l’oeuvre
A. La décision de publier
B. La fabrication matérielle du livre
C. La mise au goût du jour de l’oeuvre
D. L’élection d’un lectorat
II. Le péritexte, espace de signature de l’oeuvre
A. Pratiques éditoriales et processus d’assignation des oeuvres
B. Affirmation péritextuelle de l’autorité de l’auteur
C. La figure de l’auteur, une construction éditoriale ?
D. Du sentiment de dépossession de l’auteur à la condamnation de l’éditeur : règlement de compte ou consensus publicitaire ?
CHAPITRE II - POLITIQUES ÉDITORIALES ET STRATÉGIES DE LIBRAIRIE : . LA CONSTITUTION D’UN PAYSAGE ÉDITORIAL DE L’OEUVRE LITTÉRAIRE
I. L’insertion de l’oeuvre dans un réseau de production et de distribution. Les Angoisses douloureuses et le cercle de Janot
A. Les acteurs de la publication des Angoisses douloureuses : Janot et ses collaborateurs
B. Lieu de naissance des Angoisses douloureuses : le milieu des imprimeurs-libraires du Palais
C. Circulation et adaptation des oeuvres d’un réseau éditorial à l’autre : la participation lyonnaise à la publication des Angoisses douloureuses
II. La production en prose vernaculaire du cercle de Janot, entre réédition des succès de librairie et politique d’innovation
A. Réédition des succès de librairie : l’exploitation d’un fonds ancien
B. Promotion de la nouveauté : le développement d’un nouveau secteur éditorial
C. Innovations formelles et catégorisations génériques : effets de parenté des « nouveaux romans » sur la scène éditoriale parisienne
CHAPITRE III - UNITÉS TEXTUELLES ET STRUCTURATION NARRATIVE DES RÉCITS SENTIMENTAUX : UN DISPOSITIF SCRIPTO-VISUEL DE SIGNIFICATION
I. La structuration visuelle du texte en unités narratives, entre héritage et renouvellement
A. Mutations formelles et génériques des narrations : une structuration textuelle héritée de la tradition médiévale
B. De la composition imprimée à l’interprétation du texte : le paragraphe typographique, une unité sémantique
II. Définitions scripto-graphiques de l’unité textuelle à la Renaissance : un facteur de structuration narrative
A. Circonscription de l’unité textuelle
B. Délimitation visuelle des chapitres
III. Insertion des titres de chapitres et dispositif péritextuel
A. Titres de chapitres, manchettes et manicules
B. Titres de chapitres et tables des matières
C. Titres de chapitres et titres de parties
IV. L’énoncé titulaire et la réorientation interprétative de l’oeuvre
A. Le titre de chapitre, un élément péritextuel significatif
B. Réorientation interprétative et moralisation du récit
CHAPITRE IV - LA MISE EN PARAGRAPHES DES ANGOISSES DOULOUREUSES DE 1538 ET « LA NAISSANCE DE LA PROSE LITTÉRAIRE CLASSIQUE »
I. L’absence d’une structuration en chapitres au profit d’une distribution du texte en paragraphes
A. Un dispositif configurationnel de structuration du récit
B. Répartition et usages des signes démarcateurs de paragraphes
C. Combinaison des initiales et effets de sens
II. La mise en espace du texte : de la délimitation des unités textuelles à la présentation visuelle de la structure narrative
A. La distribution du blanc typographique sur la page encrée
B. La place de l’image dans l’espace de la page
III. Effets de sens de la mise en paragraphes : de l’unité typographique à l’unité sémantique
A. Longueur des paragraphes et production du sens
B. Ponctuation narrative de l’intrigue
C. La représentation visuelle de la parole et du dialogue
CHAPITRE V - LE CHAPITRAGE DES ANGOISSES DOULOUREUSES DE C. 1539 : DE LA NORMALISATION FORMELLE À LA RECONVERSION INTERPRÉTATIVE
I. La mise en chapitres de Denis de Harsy, une réappropriation éditoriale de la mise en livre de Denis Janot
A. L’apparition d’une distribution en chapitres : l’influence des pratiques éditoriales de Denis de Harsy
B. Une singularité de l’édition des Angoisses douloureuses de c. 1539 : l’établissement d’un dispositif de structuration à double niveau
II. Mise en paragraphes et mise en chapitres : une reconfiguration sémantico-narrative
A. Redistribution des masses textuelles
B. Réorganisation interne des chapitres
C. Subdivision interne des paragraphes
D. Simplification d’ensemble du dispositif typographique
III. L’énoncé titulaire au service d’une réorientation interprétative de l’oeuvre
A. Réorganisation du cadre péritextuel de l’ouvrage
B. Réorientation de la conduite narrative
C. Distorsions narratives et réorientations interprétatives
CHAPITRE VI – LE CISEAU, L’AIGUILLE ET LE PLOMB, OU LA FABRICATION ÉDITORIALE DU PREMIER RÉCIT SENTIMENTAL FRANÇAIS
I. Naissance d’un livre
A. Des diverses situations de communication à la naissance d’un livre
B. Un savant jeu d’intertextes éditoriaux, signe de l’actualité de la publication
C. Un univers de références habité par les livres
II. Des pratiques intertextuelles au coeur de la genèse de l’oeuvre
A. Le choix de la matière première : sélection des ouvrages-sources
B. Appropriation du patron : réécriture typographique et citations matérielles
C. Découpage des pièces du patchwork : la récolte des citations
D. Le tissage des Angoisses douloureuses : intégration et harmonisation des citations
III. Construction et valorisation de la figure auctoriale au service du succès éditorial de l’oeuvre
A. Identité féminine et stéréotypes sexués
B. Autobiographie et polyphonie énonciative
C. Ethos de l’auteur et monumentalisation des OEuvres
D. Les Angoisses douloureuses d’Hélisenne de Crenne, produit-phare d’un nouveau secteur éditorial ?
Que signifie «lire un livre», et non pas seulement «lire un texte», et quels sont les signes, visibles et invisibles, verbaux et non-verbaux, qui interviennent dans le processus interprétatif des lecteurs ?
Dans les narrations en prose vernaculaire imprimées à la Renaissance, la forme fait sens: les choix éditoriaux établissent des parentés entre les textes, le paragraphe narratif tient lieu d'unité linguistique, tandis que la disposition en chapitres conditionne les pratiques de lecture. Les politiques éditoriales des imprimeurs-libraires du Palais participent ainsi à la naissance et à la promotion d’un genre nouveau : le récit sentimental français. Les éditions successives des Angoisses douloureuses qui procèdent d’amour, considérées comme le premier récit sentimental rédigé en langue française, invitent même à penser que ce récit, loin d’être le produit d’une écriture féminine personnelle jusque là attribuée à Hélisenne de Crenne, est le fruit d’un jeu intertextuel mis en œuvre dans l’atelier des imprimeurs du cercle de Janot, pour donner naissance à un best-seller envisagé avant tout comme un produit éditorial qui répond aux attentes d’un nouveau public.
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Sommaire / Table of Contents : I. TRAPMAN, «Erasmus and Heresy» ; R. STAWARZ-LUGINBÜHL, «Entre la guerre, la peste et la famine: la question de l’identité religieuse de Jean de La Taille» ; A.-P. POUEY-MOUNOU, «Dictionnaires d’épithètes et de synonymes aux XVIe et XVIIe siècles: du lexique au manuel» ; J.-L.EGIO: Pierre de Belloy, Philippe Duplessis Mornay, Innocent Gentillet. Attribution et contenu de la Conference chrestienne (1586)» ; M.E. SEVERINI: Il destino di un libro al servizio del sovrano: la Politica di Aristotele da Loys Le Roy a John Donne» - NOTES ET DOCUMENTS - I.A.R. DE SMET etA. LEGROS, «Un manuscrit de François Baudouin dans la «librairie» de Montaigne» ; M.-L. DEMONET et A. LEGROS, «Montaigne à sa plume: quatre variantes autographes d’une correction de date dans l’avis ‘‘Au lecteur’’ des Essais de 1588 » ; N. BINGEN, «Villeneuve, Dolet et Arlier à Padoue»; O. PÉDEFLOUS, «Nouveaux éclairages sur Joannes Vaccaeus (Juan Vázquez) de Murcia» - CHRONIQUE - L.R.N. ASHLEY, «Recent Publications on Elizabethan England and Related Fields».
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Depuis l’Antiquité, les hommes ont interprété la numération des années de leur vie, tel l’empereur Auguste, autre manière de retenir le temps qui fuit. Des théories médicales ont ainsi avancé que la matière se renouvelait toutes les sept ou neuf années. Le produit de ces deux chiffres (l’un dévolu au corps, l’autre à l’esprit) donne soixante-trois, et la soixante-troisième année de la vie humaine, grande climactérique, était regardée comme très critique. C’est sous le signe du nombre et du temps que Max Engammare fait l’histoire de l’intérêt inquiet pour cette année qui reprend vigueur à la Renaissance, avec Pétrarque, mais surtout avec Marsile Ficin. On croisera la plupart des grands noms du temps, dont des théologiens, à l’instar de Philipp Melanchthon, le bras droit de Luther, et de Théodore de Bèze, celui de Calvin, mais aussi de Rabelais, celui qui a introduit le mot en français. La question du soixante-troisième roi de France, Henri III ou Henri IV, sera également posée par des Ligueurs qui ne savaient pas en 1587 ou 1588 que les deux mourraient assassinés, et l’on jouera même au jeu de l’oie. Il s’agit de comprendre l’arithmétique de ces peurs antiques réactualisées dès la fin du XVe siècle et qui n’ont pas complètement disparu aujourd’hui, preuve en est Sigmund Freud ou la soi-disant malédiction des 27 répertoriant tous les artistes célèbres morts à l’âge de vingt-sept ans (trois fois neuf).
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Ce troisième tome des œuvres de Scévole de Sainte-Marthe contient un recueil de vers latins publié en 1575, Les Œuvres de Scévole de Sainte-Marthe imprimées en 1579 et six pièces isolées parues entre les deux ouvrages.
L’ensemble reflète l’actualité de la période : parmi les nombreuses allusions aux évènements militaires et politiques, on voit retracé sur le mode épique le bref règne polonais du futur Henri III. Le poète parle aussi de lui, de son procès, de son office de Contrôleur des Finances, de ses préoccupations d’écrivain, de ses « tendres Jumeaux » ; ses dédicataires sont nombreux et variés : écrivains, magistrats, médecins, militaires, gens de la finance… Une grande partie du recueil français est consacrée l’amour ; si l’influence du jeune Desportes semble manifeste, quelques pièces expriment des sentiments beaucoup moins idéalisés.
L’édition des Œuvres complètes de Scévole de Sainte-Marthe est établie par Jean Brunel, Professeur honoraire la Faculté des Lettres de Poitiers, avec la collaboration de Pierre Martin, Professeur dans la même Université.
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Publié en 1570, augmenté de quatre récits en 1572, puis réédité à treize reprises jusqu’en 1606, ce volume marque une nouvelle étape dans la collection des Histoires tragiques inaugurée en 1559. François de Belleforest avait traduit et adapté dans les premiers volumes de la série des nouvelles empruntées au conteur italien Matteo Bandello. Il fait désormais appel à des sources très diverses pour composer douze nouvelles qui transportent le lecteur de la Scandinavie du haut Moyen Age à la France des guerres de religion, de l’Europe des Gibelins à l’Empire de Soliman le Magnifique, jusque sur les routes de Terre-Neuve et des Caraïbes.
A l’époque où Montaigne écrit ses Essais, Belleforest donne une vision bigarrée de l’expérience humaine, envisagée sous ses aspects les plus tragiques: Gaston de Foix, «l’amazone» Vlasta, ou encore Hamlet - dont le Commingeois est le premier à conter l’histoire en langue vulgaire -, sont les acteurs d’un theatrum mundi mis en scène par un écrivain qui veut surprendre, émouvoir, et édifier. Livre d’Histoire et d’histoires, Le Cinquiesme Tome offre à ses lecteurs un «Discours memorable» où s’entrelacent récits légendaires, tableaux historiques, et événements contemporains.emporains.
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Stéphanie AUBERT-GILLET,
Irena BACKUS,
Jean Paul BARBIER-MUELLER,
Philippe DESAN,
Max ENGAMMARE,
Jean-Raymond FANLO,
Marie-Madeleine FRAGONARD,
Jean-François GILMONT,
Amy GRAVES MONROE,
Christian GROSSE,
Cécile HUCHARD,
Marie-Dominique LEGRAND,
Frank LESTRINGANT,
Olivier POT,
Ruth STAWARZ-LUGINBÜHL,
A. TOURNON,
R. ZUBER
TABLE DES MATIÈRES
PRÉSENTATION
Olivier Pot, «Quand la polygraphie devient une poétique»
PREMIÈRE PARTIE ÉLOGE DE LA CURIOSITÉ
Neil Kelly, «« Rendre commode ce qui pourroit nous nuire en beaucoup de sortes »le détournement des textes et de la curiosité chez Simon Goulart»
Frank Lestringant, «L’Osório de Goulart et ses fortunes, de Thevet à Montaigne»
DEUXIÈME PARTIE: LA SECONDE MAIN DU POLYGRAPHE ENTRE TRADUCTION, ADAPTATION ET COMMENTAIRE
Marie-Madeleine Fragonard, «Les additions à la traduction des Méditations historiques de Philippe Camerarius»
Marie-Dominique Legrand, «Simon Goulart éditeur de Plutarque: exploration de ses noteset de ses commentaires à la traduction de Jacques Amyot»
Irena Backus, «Quels témoins de quelle vérité ? Le Catalogus testium veritatisde Mathias Flacius Illyricus revu par Goulart»
TROISIÈME PARTIE: LA FABRIQUE DE L’HISTOIRELES LIEUX DE MÉMOIRE
Jan Miernowski, «La mémoire des massacres chez Simon Goulart et les origines de la fable protestant» Jean-Raymond Fanlo, «Du monument religieux à l’écriture de l’histoire: la continuationde l’Histoire des martyrs par Simon Goulart»
QUATRIÈME PARTIE: LES AMBIGUÏTÉS DE LA NATURE PARACELSISME, ASTROLOGIE, DÉMONISME
Max Engammare, «Les intérêts astrologiques de S.G.S»
Isabelle Pantin, «Les enjeux du commentaire: Goulart, Du Bartas et Du Chesne»
Cécile Huchard, «Merveille et vanité : la nature et les livresdans le Thrésor d’histoires admirables»
Amy Graves-Monroe, «Ce n’est pas sorcier: la place du surnaturel dans l’oeuvrede Simon Goulart»
André Tournon, «Le diable de Delphes et les commentaires prophylatiquesde Simon Goulart»
CINQUIÈME PARTIE : GOULART ET SES RÉSEAUX ÉDITORIAUX
Jean-François Gilmont, «Simon Goulart et ses imprimeurs»
Stéphanie Aubert-Gillet, «Une école poétique autour de Simon Goulart»
Jeltine L.R. Ledegang-Keegstra, «Simon Goulart dans les alba amicorum»
Philippe Desan, «Simon Goulart éditeur de Montaigne»
SIXIÈME PARTIE: COELO MUSA BEAT POÉSIE, THÉÂTRE ET MUSIQUE
Jean Paul Barbier-Mueller, «Trois poètes réformés à Genève : Goulart, Poupo et Du Chesne»
Olivier Pot, «‘‘Numero, ordine et pondere’’. Les Imitations chrestiennes :manifeste d’une Ecole poétique Réformée ?»
Roger Zuber, «Goulart et ses « consolations » contre la mort»
Christian Grosse et Ruth Stawarz-Luginbühl, «‘‘La Pastorale’’ (1585) de Simon Goulart: théâtreet tradition bucolique au service d’une célébration politique»
Annie Coeurdevey, «Simon Goulart, mélomane et contrefacteur»
ANNEXES
Annexe I. Les impressions genevoises de Simon Goulart
Annexe II. Les oies de l’Escalade ou quand le hasardse fait Providence
Annexe III. Couronnes et guirlandes
Annexe IV. Une synopsis du sens
Né à Senlis, réfugié à Genève dès 1561, Simon Goulart (1543-1628) est un des écrivains « polygraphes » les plus féconds de son époque. Traducteur de Plutarque, éditeur de Montaigne, adaptateur des chansons d’Orlande de Lassus, commentateur de Du Bartas, auteur d’« histoires extraordinaires », poète lyrique et satirique voire dramaturge, il fut un « passeur » entre les Réformes d’expression allemande et française. Au carrefour de plusieurs disciplines, mêlant philosophie, théologie, morale, musique, astrologie, démonologie et alchimie, son oeuvre encyclopédique qui résume les préoccupations de la Renaissance tardive oriente le calvinisme vers une sensibilité moins austère, plus « littéraire » et humaniste. Successeur de Calvin et de Bèze à la tête de la Compagnie des Pasteurs il s’engagea dans l’action politique de son temps qu’il a analysée avec sagacité en tant qu’historien des guerres de religion.
Les études réunies ici explorent pour la première fois la complexité d’une œuvre dont les « intérêts vastes comme le monde » concernent un public averti aussi bien que curieux.
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Table des matières / I. GARNIER et O. LEPATRE, « Introduction » – THEORIE – M.-H. SERVET, « Impertinent, Impertinence : les mots et la chose » ; M. LEVESQUE, « "Je m’en sers de ma seule autorité" : possibilité et enjeux d’un usage impertinent de la langue au XVIIe siècle » ; F. BOISSIERAS, « Approche rhétorique et pragmatique de la notion d’impertinence » – L’IMPERTINENCE GENERIQUE – A.-P. POUEY-MOUNOU, « Impertinences montaigniennes : la "suffisance" des Essais » ; M.-C. THOMINE-BICHARD « Les impertinences d’Eutrapel : Baliverneries (1548) et Contes et Discours d’Eutrapel (1585) » ; P. MOUNIER, « Le roman et l’humanisme : anticonformisme d’un genre à la Renaissance » ; A. ROOSE, « L’impropre et l’obscène dans Alector de Barthélémy Aneau » ; Y. CHARARA, « Les Aventures de Télémaque de Fénelon inspiration mystique et scandale générique » – LES GENRES DE L’IMPERTINENCE – M. AUBAGUE, « Les Trois Francion de Charles Sorel (1623, 1626, 1633) : impertinence générique et voix d’auteur » ; F. POULET, « De la satire des ridicules à la parrêsia : impertinence et extravagance dans l’histoire comique (1620-1660) » ; D. BERTRAND, « Impertinentes traversées urbaines : risque de la parrêsia et frontières de l’acceptabilité burlesque » ; H. DURANTON, « Au-delà de l’impertinence : la littérature satirique versifiée (1715-1789) » ; P. CAMBOU, « L’obscène et le saugrenu comme formes d’impertinence dans le conte voltairien » ; C. RAMON, « La transgression des libertins : une affaire de genre ? (Crébillon, Sade, Nerciat) » ; M. TSIMBIDY, « De l’impertinence des Mémoires ou des mémorialistes sous Louis XIV » ; K. ABIVEN, « Les impertinences de l’Histoire : une question d’aptum générique » ; F. WILD, « Savoir et impertinence dans les ana » ; P. GETHNER, « Le Proverbe dramatique, genre de l’impertinence » – Impertinence et bienséances – T. TRAN, « Les impertinences de la parole : collusions génériques et renversement satirique dans les Loups ravissans de Robert Gobin (c. 1505) » ; O. LEPLATRE, « L’impertinence des images : mont(r)er. A propos de l’Enigme joyeuse pour les bons esprits et du Centre de l’amour » ; P. EICHEL-LOJKINE, « Le conte merveilleux, un genre autorisant l’impertinence ? Bienséance, contrôle, image dans "Le Maître Chat ou le Chat Botté" » ; M.-M. FRAGONARD, « Livres de piété, prédication et modes féminines : l’enfer des bonnes intentions » ; C. ARONICA, « Quand les désirs sont désordre. Le corps impertinent de la tragédie classique » ; C. BARBAFIERI, « "La femme est le potage de l’homme" : les plaisanteries malséantes dans la France classique » ; M. BERMANN, « Les Contes et Nouvelles en vers ou une mondanité impertinente » ; C. LIGNEREUX, « Le conseil, un acte de langage contraire aux bienséances ? » – IMPERTINENCE, AUTORITE ET AUCTORIALITE – D. Reguig, « Impertinence et littérarité chez Boileau » ; C. BAHIER-PORTE, « Les réécritures "modernes" du bouclier d’Achille : l’inavouable pertinence d’un modèle inconvenant (Lesage, La Motte, Marivaux) » ; C. HAMMANN, « Pertinence du dé-plaire : une mise en cause de l’aptum dans les Lettres au XVIIIe siècle ».
L’impertinence a longtemps eu mauvaise presse. Sottise ou fatuité, extravagance ou importunité, l’impertinence choque, indispose, heurte l’usage ou la bienséance. Quand elle s’invite en littérature, elle fournit bien plus que l’étoffe de personnages de comédie – médecins ou coquettes – ou de romans burlesques : elle joue avec les codes sociaux et les normes de la représentation, bousculant les frontières des genres établis qu’elle subvertit ou régénère.
Après une mise en perspective conceptuelle de la notion, vingt-neuf études éclairent ici les multiples facettes de l’impertinence sous l’Ancien Régime. Elles les envisagent en diachronie d’un point de vue lexical, rhétorique, générique, en jouant de la complémentarité des approches. Composant un savoureux pot-pourri, roman, conte, histoire fabuleuse, énigme, recueil d’emblèmes, livres de piété, tragédie, mémoires, chansons satiriques, images tendancieuses, apparaissent tantôt comme lieux de l’impertinence générique, tantôt comme genres de l’impertinence.
Énergie créatrice au XVIe siècle, sulfureux débordement à canaliser au siècle classique, elle devient force émancipatrice pour les Lumières. En à peine plus d’un siècle, l’impertinence inverse totalement sa valeur socio-esthétique et contribue à faire jaillir la vérité en se soustrayant au carcan des codes. Stigmatisée comme vice par l’opinion commune, retournement de la folie en sagesse pour les écrivains indociles – qu’on peut considérer précurseurs –, elle apparaît comme qualité de l’intelligence et de l’esprit – pour ne pas dire vertu – et finit par imprégner toute une époque, valeur partagée d’un temps qui, par sa liberté de penser et d’écrire, marque encore le nôtre.
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Avec neuf discours et quatre-vingt-une lettres (conservées dans toute l'Europe), ce volume clôt l’édition critique des discours (1563-1568) et de la correspondance politique et familière (1536-1573) de Michel de L’Hospital, que L. Petris avait entamée dans La Plume et la tribune (Droz, 2002). Il comporte de nombreux inédits, notamment des échanges épistolaires avec Henri II, François II, Charles IX, Catherine de Médicis, Pie IV, Nicolas de La Croix, Marguerite de Savoie, Georg Cracow, etc., complétés par l’édition du testament de Michel de L’Hospital, ainsi que par des textes de Brantôme, Thévet et Turnèbe.
S’y révèlent à la fois une action politique qui œuvre à la coexistence confessionnelle au début des guerres de religion et les pensées plus intimes du chancelier de France, partagé entre l’engagement civil et l’« arriere-boutique » de la retraite et des Lettres. Entre parole rhétorique, échange épistolaire, voix poétique des Carmina et écriture privée des notes autographes, c’est une œuvre majeure et complexe visant à agir sur son temps qui est ainsi mise au jour et qui éclaire les visages de celui qui œuvra et posa en pacificateur.